< Tiers Livre, le journal images : gagné perdu

gagné perdu

Et tout d’un coup pendant une heure il y aurait eu tout à photographier, même les odeurs, mais voilà, je n’avais pas emporté le petit Canon G12, juste ce gros bêta d’iPhone avec ses images à la manque. Et tu es devant l’émerveillement sans âge de la fête foraine qui s’installe sur la place de ce village où tu marches, les banderoles au-dessus des rues, les autos-boum et la pêche au canard, et bien sûr le tir à la carabine. Elles sont lourdes et la mire est de traviole, mais la remorque est chargée de merveilles. Heureusement que personne ne gagne jamais que les lots de consolation, ou une de ces peluches immensément grandes et immensément tristes. Il y a des anneaux sur le col de la bouteille devant l’objet convoité, il faut dézinguer l’anneau mais qu’il tombe en coiffant la bouteille. Il était trop tôt, personne ne s’y essayait. Tu repenses à la scène de tir forain dans Voyage au bout de la nuit. Mais comme la mention comédie/tragédie dans nos salles des fêtes, ce gagné/perdu qui ne laisse pas d’autre alternative (sinon ne pas jouer). Et tu te dis que la vie aussi ça a été comme ça, que tu aurais tellement préféré une autre alternative, que tu n’as jamais aimé les carabines même pour de faux, et que tu n’oses même pas savoir comment va retomber ton propre anneau.


François Bon © Tiers Livre Éditeur, mentions légales
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1ère mise en ligne et dernière modification le 18 août 2012
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