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2016.03.21 | de l’intérêt des choses bizarres

une autre date au hasard :
2020.03.16 | rentrer à la maison

En ce moment c’est un peu la vie par cases. C’est bien, ça veut dire que j’ai retrouvé ce socle professionnel sans quoi ben euh. De belles rencontres, souvent surprenantes, comme l’autre samedi à la médiathèque d’Olivet avec un très actif réseau, principalement animé par des retraités, menant eux-mêmes des travaux (bénévoles) d’ateliers et mémoire (récits ou archives images) dans les maisons de retraite ou lieu d’accompagnement pour celles et ceux qu’on dit en très grande difficulté. Je n’avais pas anticipé qu’ils seraient 45 mais ça s’est super bien passé (et bel accueil l’équipe d’Olivet). Rien à voir avec ce samedi-ci, et, dans la calme salle du CNL déserté (sous le portrait de Jean Gattegno, qui était mon ami dès avant le CNL, quand ça s’appelait Centre national des Lettres et non pas Centre national du Livre) on a travaillé avec 15 jeunes traducteurs déjà professionnalisés, mais qui pendant 2 ans à l’ETL se rassemblent 1 samedi sur 2, venus de Toulouse ou de Fribourg, pour interroger leur démarche – et merci Olivier Mannoni. Reste que voilà, si tu bosses le samedi, c’est pas dans les 3 jours d’interruption week-end que tu vas remonter à l’assaut de trucs perso – ça devra probablement attendre mi-juin et le grand vide (financier aussi, c’est comme ça) des 3 mois d’été : l’inquiétude est productrice, quand elle est systémique c’est parfois moins simple. Pareil pour le mois à venir, préparer les 3 confs sur le numérique (Amiens, Nice, Montréal même si ce sera un seul chantier et qu’il m’est nécessaire), une préface pour le livre d’un étonnant photographe, garder la chauffe sous Lovecraft avec les 2 adaptations France Culture, là c’est chantier immédiat, en attendant que l’été etc. Alors, hors la limite que tu traces à la craie autour de ce que tu dis parce que ça concerne soit les proches, soit ce cercle plus étroit, très étroit, qui concerne l’âge, le mental, le pourquoi, et dont tu ne parles pas – elles sont quantitativement parfois plus épaisses que les autres, les heures sans parler –, tu fais le compte de ces petites choses qui ont échappé à ces cases réglées qui t’effraient, une fois vues dans le rétroviseur : ce vieux monsieur à Olivet qui t’a parlé de la formation de la langue japonaise, et ce mercredi, faisant visiter l’école à David Desrimais qui a présenté Jean Boîte aux étudiants du studio écriture, entrer dans le dédale vide des 7 labos argentique, déclarant avec certitude que l’année précédente il y avait une et une seule étudiante qui les utilisait mais en permanence (à Cergy ça photographie beaucoup argentique, mais ensuite ils scannent le néga et en sortent un fichier de 250 Mo qu’ils traitent sur LightRoom), et hop à ce moment-là je vois surgir de la nuit notre étudiante norvégienne, et, à peine 1 heure plus tard, je vois aussi surgir celle-même qui l’an passé consacrait ses heures à la photographie sans appareil, revenue pour un travail et qui était donc là derrière une des portes minces lorsque je parlais d’elle comme présence que je croyais à jamais enfuie – elle serait sortie à cet instant que j’aurais vraiment cru à un fantôme. J’ajoute qu’après vérification, dans les 7 labos déserts, ni la Norvégienne ni la Japonaise ne s’étaient croisées elles-mêmes. Ou bien, samedi en remontant du métro Rue du Bac, à la dame qui demandait la direction de la rue de Varenne avoir désigné la rue à droite d’un air sûr et protecteur tandis que toi tu prenais la même rue à gauche et soudain, quelques longues minutes plus tard, croiser toi-même la rue de Varenne, découvrir ton erreur, faire demi-tour et arriver 11 minutes en retard au CNL puis s’être demandé toute la journée ce qu’il s’en était induit pour cette dame que tu avais conseillée radicalement dans le sens opposé de ce qu’elle cherchait. En soi, rien du tout, mais à y réfléchir, le contraire : ce qui donne sens à tout ça, et assure encore et malgré tout un lien à l’écriture, ce serait précisément, peut-être, la capacité du réel à inclure ce double-fond, ce permanent renversement potentiel de tout l’existant. Images : marche au long de la Loire en contrebas de la route, hier.

 



vient de paraître : Fictions du corps, dessins de Philippe Cognée, postface de Jeremy Liron,
aux éditions L’Atelier contemporain, 20 € tout rond, merci de votre soutien.

François Bon © Tiers Livre Éditeur, mentions légales
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1ère mise en ligne et dernière modification le 21 mars 2016
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