< Tiers Livre, le journal images : il sèche

il sèche

Il sèche, dit-il, l’ami Philippe en commentaire : bon, je pourrais prendre ça à la rigolade, disant qu’en philosophe qu’il est, et libr-critique par dessus le marché, il y a à oublier ce besoin de rationaliser... Explique-toi, qu’il me dit : mais si seulement on pouvait vraiment à soi se l’expliquer, on n’écrirait pas de fiction, ce ne serait rien qu’un exercice ? Alors, dans le petit basculement qui ce matin m’a fait partir dans ce texte, il y a : 1, l’habitude de lire des billets de veille informatique ou de veille bibliothéconomie à quoi je ne comprends pas le quart ou le cinquième, mais souvent le vocabulaire, les modes d’association (j’ai cité dans le billet cloud computing, web sémantique, applications dynamiques), et justement le fait que, sans maîtriser ce dont il s’agit, on finit quand même par penser autrement ; 2, la croissance exponentielle de face book en ce moment, et ces discours sur l’éventuelle dangerosité des données privées et recoupements ; 3, la récurrence du schéma de l’anticipation temporelle dans la littérature fantastique : comment narrativement construire un modèle narratif qui serait une prévision du temps ? – ayant tout ça dans ma marmite, je ne savais pas du tout ce que j’allais écrire, sauf envie d’aller y voir - il s’agit toujours de baser une crédibilité suffisante aux éléments fictifs du texte, d’où l’appui sur le génial Mandelbrot, dont l’invention est partie de ce détail du bruit dans les réseaux de téléphonie, histoire connue, alors qu’aujourd’hui c’est la totalité du monde que nous tous appréhendons via Mandelbrot, et son symétrique, l’esbrouffe de la mémoire de l’eau – l’idée de ne pas "comprendre", pourquoi pas : justement parce que ce genre de texte, avec le vocabulaire technique spécialisé qu’ils emploient, ne nous est jamais totalement compréhensible – mais dans ses textes sur le magnétisme, est-ce que Poe ne donne pas le chemin ? on raconte toujours à la frontière du non totalement compréhensible, alors, au moment où on invente (l’analyse des données face book permettrait-elle de prédire ceux qui vont mourir en voiture dans les 10 jours à venir ?), on n’a pas à déplacer l’histoire, juste à la maintenir dans ce même petit écart avec la frontière. Et l’avantage du Net, c’est qu’on peut se faire ce petit atelier de funambulisme personnel sur son propre blog, sans rien gêner personne... Reste que ça m’excite bigrement, en ce moment, le cloud computing, la pensée réseau et tout ça. Donc un argument rationnel : aller avec les outils de la littérature là où le monde numérique s’invente, sous forme de fable, allégorie, micro-inventions, et un autre totalement irrationnel : le plaisir qu’on y prend...


François Bon © Tiers Livre Éditeur, mentions légales
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1ère mise en ligne et dernière modification le 25 décembre 2008
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