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érables de langue

Bonne conversation hier avec Mahigan. Étrangeté, lui le Québécois rencontré à Paris, de l’accueillir dans mon bureau au 8ème étage de l’UdeM (enfin, celui que me prête Ugo Dionne – mais n’importe, Mahigan on avait aussi à parler travail). En descendant à la cafet, réflexions sur la langue : au bout de 5 semaines, commence tout juste à passer l’obsession auditive. C’est plus facile avec une langue étrangère, on la tient à distance. Lui, il dit qu’à Paris il a en en permanence l’impression qu’on le méprisait, la langue québécoise immédiatement reconnaissable. Il m’envoie sur des séries documentaires de Radio Canada : les Remarquables oubliés de Daniel Bouchard. Là il retrouvait un peu de son parler. Ici, la semaine dernière, visionnage de Porte des Lilas, avec Brasseur et Brassens (René Clair, 1934 ?), juste pour un peu de ce vieux parigot (qu’on entend d’ailleurs si peu à Paris, maintenant). Problème de cette obsession auditive : même quand vous lisez pour vous, des prononciations québécoises s’installent. Mais je ne comprends pas que Mahigan parle de mépris : et j’ai assez de copains qui l’ont fréquenté aussi. Est-ce que tout simplement parce qu’ils nous placent, ceux qui disent nous autres, face à une origine de notre langue, celle qu’on devrait parler et qu’on a oubliée ? En Acadie, mars dernier, c’est le vendéen des années 50 qui me revenait. Dans la séance d’écriture avec les étudiants, ensuite, le sentiment qu’on commence à ouvrir cette porte : la spécificité québécoise de ce qui s’écrit n’est pas seulement dans l’oralité qui s’y importe. Elle est dans la façon dont la syntaxe se saisit de signes, territoires, circulations, usages, qui littéralement nous sont étrangers. Et c’est bien la raison du travail entamé.


François Bon © Tiers Livre Éditeur, mentions légales
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1ère mise en ligne et dernière modification le 1er octobre 2009
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