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le tiers livre




dictionnaire | heures

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heures


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1

Je ne crois pas avoir jamais commencé de livre, ou écrit de premier jet — même d’articles — sinon au réveil, et très longtemps en laissant tomber la dernière phase de sommeil, quitte à pratiquer dans périodes intenses le sommeil fractionné, un petit rattrapage de début aprem ou fin de soirée, mais tout bref. Créer la possibilité d’heures fragiles, où on écrira sans multiplier tout autour les murs du doute. Ensuite voilà, c’est 8 heures du mat’, on a fini la journée, on trouvera bien d’autres choses à faire, ou bien retravailler les passages des jours précédents, ou gamberger à ce qui se passera le lendemain matin. On a cette insolence : j’ai travaillé, donc ça va, fichez moi la paix (et qu’on le dit y compris à soi-même). Il y a quand même cette contrainte, dans ces réveils : ne pas laisser trop entrer le monde, ni les mails, ni les Unes de journaux (pour radio etc, jamais toléré). Qu’on puisse tomber, en quelque sorte. Les rituels de mise au travail : ils diffèrent pour chacun, on les rassemble ?

entrée proposée par FB

2

C’est l’aube celle nocturne et froide de l’hiver. C’est de plus en plus tôt quand les nuits raccourcissent. S’enchaineront trois à quatre heures de travail et surtout pas le ventre vide ; une faim de louve se dresse quand les yeux s’ouvrent sur cette nuit de matin. La radio à bas bruit un réflexe le temps d’avaler une soupe, ou un hareng avec du thé très noir. Échanger une parole ou même une caresse c’est mettre en péril le rituel. Alors vivre seule où partager sa vie avec des dormeurs du matin et parfois se lever encore plus tôt pour n’avoir à croiser personne. Ne surtout pas se laver garder les cendres de la nuit, recouvrir ses vêtement de dormeurs avec ce qui tombe sous la main. C’est le sentiment naïf de commencer à blanc. C’est le sentiment d’un présent total. Et même si un programme est établi. Même s’il s’agit de reprendre où ça a été laissé en plan c’est comme sans avant et sans après.

entrée proposée par Nathalie Holt

3

L’écriture de l’heure obéit à des codes différents : les militaires et les policiers, utilisant des chiffres, n’écrivent pas l’heure comme les pilotes d’avions ou les chef de gare et les auteurs de textes littéraires comme les juristes et les rédacteurs de protocoles doivent, eux, écrire l’heure en toutes lettres. Mais si l’écriture de l’heure est variable, la question de savoir quelle est l’heure de l’écriture est pour moi indécidable. Il n’y a pas de bonnes ou de mauvaises heures pour écrire pour cette bonne et mauvaise raison que l’heure qui m’est nécessaire ne doit pas avoir de fin, ne pas être limitée à soixante minutes. Cette heure infinie indispensable ne doit rien avoir devant elle, pas d’obstacles, pas d’aiguilles qui avancent, pas de sonneries, pas de rendez-vous, pas de soleil qui se lève, pas de paroles, pas de bruits. Il ne s’agit pas d’une heure, ni d’un temps entre parenthèses. Une durée ouverte se perdant à l’horizon entre mer et nuages, comme un espace du temps dont le temps serait absent.

entrée proposée par Ugo Pandolfi

4

Heures : la nuit. La nuit du soir, quand la ville s’est repliée. Alors toi aussi. Rien qui doit faire irruption. S’abstraire au monde pour plonger en dedans. Absorbé, avalé par le travail laborieux sur la page. À la remontée, toujours constater l’intensité/densité des heures qui ont tourné. En sortir de cette douce épaisseur de sombre.

entrée proposée par Jérôme Cé

5

Matin : pour moi écrire, c’est le matin. Pas un dogme, bien sûr. Juste un constat, fait à la longue. Après des années à se dire que ça devait forcément être le soir. À suer soir après soir sur des feuilles avec un grand vide à l’intérieur, à aller jusqu’à se priver de sommeil pour rien, le plus souvent rien. Alors que le matin ! On dirait qu’il faudrait que les rêves de la nuit soient passés par là. Pas pour les transcrire… encore que, parfois… Mais avoir été en contact avec les rêves de la nuit, c’est comme si cela avait assoupli quelque chose, la zone de contact avec tout ce que l’on a à écrire est plus vaste et plus animée aussi. Les franges sont actives. C’est ainsi que viennent les mots qu’un souffle encore tranquille laisse venir. C’est pour moi une façon de s’éveiller que d’écrire le matin. Une façon plus tranquille d’être dans sa journée, d’être celui qui a écrit, oh même si cela s’oublie parfois vite… En revanche, ce qui est écrit porte peut-être le tremblement de ce qui s’est fait sous l’éclairage des rêves, un tremblement qui peut être à la fois vibration sonore — les mots prononcés en rêve dans des langues diverses me reviennent alors — et aussi miroitement, bonne aubaine au paysage mais surtout phénomène précurseur des mirages d’où surgissent les personnages inattendus.

entrée proposée par Philippe Sahuc Saüc


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1ère mise en ligne et dernière modification le 19 avril 2021.
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