choses depuis toujours acceptées

énigmatiques


Mystère qu’à de certaines heures il faut certains textes, et nuls autres. Tel auteur, si souvent visité, et qui se révélera à cet instant encore infiniment visitable, et neuf encore, au lieu même de si dense et fréquente visite.

C’est le cas ce soir. Alors le recopier, le texte lu, dépositaire de cette énigme, fait partie du trajet même qui nous lie à lui.

Je rajouterai plus tard la source précise, mais c’est facile à retrouver, à deviner. Sans doute c’est lié aux espaces d’ici, aux textes entendus ou lus après les ateliers d’écriture, ou au voyage à Peribonka et Mistassini qui se profile, ou bien au froid, ou aux attentes et craintes ? Ils sont là, les textes qu’on reparcourt.

 


Choses, choses, choses qui en disent long quand elles disent autre chose.

Choses depuis toujours acceptées, mais leurs rapports n’ont pas été acceptés.

Autrement placées, réfractaires, cependant apaisées.

Toute chose avec une autre chose, avec plusieurs autres choses électivement, tend à entrer en résonance.

Et tout être avec un autre être, accordé virtuellement, et tout objet avec un autre objet, et tout ensemble avec un autre ensemble.

Partout il y a commencement d’entrée en résonance, pourvu qu’on ne s’y oppose pas par une volonté braquée, pourvu seulement qu’on laisse venir.

Partout aussi il y a commencement d’entrée en dissonance, commencement de déplacement pour davantage entrer en dissonance, en royale dissonance.

Pour qui l’a saisi, la ville close s’ouvre alors, celle-là même qui le retenait prisonnier. Mais elle va lui devenir nécessaire. La prison, il ne pourra plus s’en passer. L’habitude, la volonté assurée de périodiquement pouvoir l’abîmer, l’éliminer, la détruire et la ridiculiser, le tient à présent.
Prisonnier ? Pas prisonnier ? Autrement prisonnier.

 


Deux nuages sont entrés dans la chambre, rôdent autour des meubles, mais sans insister, toujours nuages, toujours pour au-delà, pour absence, entre fenêtre et porte, distraits, pas apprivoisés, petits, véritables poussins de nuages, pas pour cela moins nuages, toujours dans leur espace, dans leur monde, éludant les relations comme l’oeil du guépard dont, quoi qu’on fasse, on ne peut croiser le regard, qui toujours se porte au loin, attendant du lointain seul l’événement.

Tableau plein, mais qui vide, négateur qui pourtant prolonge, traître qui défait ce qu’il apporte, ayant malignement introduit celles-là mêmes qui rendent « absent » les cotonneuses présences des espaces aériens.

 


Maisons alignées.

Appliqués à la façade, debout, dos à la pierre, à une certaine hauteur, en suspension sans appui, immobiles, des hommes en rang, corrects, habillés pour sortir, en pardessus et chapeau sur la tête, tous strictement semblables sauf pour la taille. Il y en a trois.

Façades de maisons, façades d’hommes.

Aucun n’entre, ni ne sort. Pas en situation pour entrer. Comme plaqués dessus ils restent en surface. À part, les hommes ! Pas d’accueil dans la maison inhumaine, mais qui affiche « hommes ».

Anonymes, gardant la distance, figés, chacun en son étroit espace régulier, qui ne doit pas être réduit. Maintien à maintenir.

 


Ne verra-t-on jamais dans un beau visage silencieux, ou dans un visage sans corps, ou dans une tête en plâtre ou en marbre, le front immobile prendre soudain mémoire de ceci ou de cela et la tempe se mouiller du souvenir d’un ancien événement tragique ?

Si. C’est arrivé. Ici même. Une tache de sang est apparue et s’élargit.

Sur le blanc visage sans ombre, le souvenir « marquant » d’abord secret s’est trahi. Le sang va sourdre de la blessure de l’âme.

Ai-delà de la tempe, l’intense rouge s’étend, s’aggrave, va devenir ineffaçable.

Par la fenêtre, dans le monde du dehors, des nuages passent, qui paraissent pensés ; qui paraissent ralentis, qui demeurent, telle une situation grave qui ne sera jamais réglée, sur lesquels le rideau, à la fenêtre, ne sera jamais qu’à moitié fermé.

Sortie de la main du sculpteur, entrée dans la matière, la vie continue.

D’elle-même, enfin, la pierre ressent, manifeste. À présent elle revit un drame.

Saignant visage de marbre, par ailleurs inchangé, s’exprimant en silence.

 


Il y a autour de tout spectacle, pour qui l’observe méditativement, deux grands rideaux épais et sombres, qui vont se refermer. Annulant arbres et gens et fêtes.

Ennui, ennui toujours. Désappointement qui revient, qui va tout refermer.

Faire qu’il n’y ait plus rien à voir. Que plus rien ne se dérange.

Faire en sorte qu’il ne se passe plus rien, que tout enfin soit arrêté.

 


Un oiseau qui traverserait des nuages, que des nuages traverseraient...

Tandis qu’il volerait les ailes étendues largement par dessus les mers, non plus criant,
perpétuellement affamé, mais devenu contemplatif...

Oiseau en plein ciel, traversé de ciels.


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1ère mise en ligne et dernière modification le 3 février 2010
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