du racisme ordinaire

la France par le détail, aussi bas qu’on soit rendu


Vieux lycée prestigieux d’une grande ville de province, classe préparatoire scientifique. Le lycée s’enorgueillit d’un premier au concours d’entrée des Ponts et Chaussées l’an dernier, un jeune venu de Casablanca pour les 2 ans de prépa. Cette année, ils sont trois à arriver en France, s’approprier depuis à peine deux jours la ville et le pays. Le professeur agrégé de physique : « Ah, trois Marocains, ça va, cette année ce n’est pas trop exotique... » Le racisme banalisé dans la langue banalise-t-il le racisme ? C’est moins violent qu’à Paris, les fouilles dans le métro, mains contre le mur, selon la couleur de peau : est-ce moins pire ? Et qui oserait prendre sanction contre l’imbécile, auréolé de toute l’institution qu’en ce moment il représente ? Qui disposerait de l’autorité de le révoquer immédiatement, si c’est l’institution même, l’Éducation nationale, qui engendre ça comme état de fait officiel ? Dire à ces jeunes que ce n’est pas un hasard si tant d’autres de leurs pays, ou de Martinique, choisissent plutôt Montréal ou Boston ? C’est en fin d’après-midi qu’il raconte ça, le jeune étudiant. Encore vaguement blême. Mais surtout, cette impossibilité même à comprendre, à franchir la distance mentale : « On n’est quand même pas des bêtes de zoo ? », dit-il, puis silence. On fait quoi, nous, quand on a honte à ce point ?


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1ère mise en ligne et dernière modification le 4 septembre 2010
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