on parle pour leur dos

du cynisme ambiant et de l’argent roi


Le spectacle Daewoo est accueilli pour deux semaines au Théâtre universitaire de Nantes. Il sera accompagné de ce texte.

La richesse de notre art, de notre culture, a partie liée à ce qui fait la spécificité politique de notre pays : on peut avoir des options radicalement différentes, opposées, en lutte, les choix sont pris ensemble et respectés. C’est ce fonctionnement là qui est mis à mal, subit une dérive cynique et arrogante. Le pouvoir de décider concentré dans le camp des notables, on vous laisse protester, on n’écoute même plus. Et nous, qui avons grandi parmi tant de ces débats de sociétés, de ces conflits à mener, nous avons ici notre idée, notre exigence de l’homme : on n’a plus affaire qu’à des dos tournés. Jamais, dans cette vieille société occidentale usée, n’a circulé tant d’argent, pour des profits aussi immenses et rassemblés dans si peu de mains : voyez Total, voyez BNP, ou Vivendi, tant d’autres. Cet argent n’est plus redevable de rien à la communauté. C’est le marché, ils disent. Alors les universités n’ont plus de quoi payer leur chauffage, alors on continue de laisser fermer partout ces usines qui faisaient le tissu actif de notre sol : non pas qu’elles ne soient plus viables, ni utiles. Non, les configurations de profit s’établissent ailleurs. Daewoo en est un cas exemplaire : mais chaque semaine apporte des dizaines de nouveaux cas comme celui de Daewoo. Ainsi les protestations des intermittents du spectacle, sur lesquels repose une grande part du tissu culturel de nos villes, festivals, établissements : rien de réglé, juste le couloir décidé par le Medef. Ainsi la précarité proclamée loi générale pour l’emploi des jeunes : juste corvéables. Si nous jouons ce soir, toute l’équipe de ce spectacle, actrices, techniciens, metteur en scène, auteur, s’associe à la large protestation qui monte dans ce pays, autant contre la politique autoritaire, délibérément droitière et au service de l’argent* qui y est mise en place à salves accélérées, que contre le cynisme avec lequel ceux qui tiennent de nous ce pouvoir ont décidé de ne plus rien discuter, ne plus rien entendre.

 

* ajoutons la cacophonie DADVSI pour soumettre nos lieux de création Internet à la finalité argent, et le retrait de la littérature de la liste officielle des enseignements artistiques, où le ministère de la Culture, qui aurait dû être notre garant, s’est lamentablement empêtré dans les combats d’arrière-garde de l’éducation nationale.


responsable publication François Bon © Tiers Livre Éditeur, cf mentions légales
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1ère mise en ligne et dernière modification le 8 mars 2006
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