Stones, 37 | piano siège éjectable (RIP Nicky Hopkins)

50 histoires vraies concernant les Rolling Stones – un légendaire moderne


Basically, a two guitar band, dira Richards toute sa vie : le binôme des deux guitares alternant leurs rôles sera la base des Rolling Stones.

Ian Stewart avait pourtant été le premier Stone officiel, répondant à la première audition tentée par Brian, surveillant son vélo par la fenêtre et posant son sandwich sur l’instrument. Stu est viré par Andrew Loog Oldham pour cause de bonne tête, sans réfléchir qu’en studio l’apport des claviers est indispensable.

Stu restera donc toute sa vie non pas seulement le logisticien des Stones, le directeur technique, autorité morale, mais leur pianiste de scène dès que ça bouge un peu, et qu’on va vers le boogie-woogie (l’écouter aussi dans Boogie with Stu de Led Zeppelin, puisqu’il accompagne le camion studio des Stones quand on le loue aux copains).

Les trois cruciales premières années, un des facteurs déterminant de l’explosion Stones c’est qu’ils enregistrent à Chicago et Los Angeles – tous les mixages des 45 tours se font chez RCA, un son auquel n’ont pas accès les européens, et la présence de Jack Nitzsche, premier dans ce rôle de pianiste arrangeur bricoleur.

Le studio Olympic ouvre à Londres en 1967, dispose à son tour d’une console analogique 8 pistes, et de ce moment les Stones enregistreront chez eux.

Nicky Hopkins a l’âge de Richards à 2 mois près, il a lui aussi reçu le baptême du Marquee avec Screamin’ Lord Sutch, le groupe phare des débuts, qui n’aurait jamais pensé se faire déboulonner par les Stones. Le grand type maigre et timide passe de groupe en groupe, et finit par rejoindre le Jeff Beck Group, ce sera sa première tournée américaine. Il est trop invisible, celui qui intitulera son disque solo The Thin Man Was A Dreamer. On ne se souvient pas assez qu’il joue sur les premiers albums du Jefferson Airplane et qu’il est sur scène avec eux à Woodstock.

Quand les Stones se lancent dans Satanic Majesties, l’époque est aux expérimentations studio. La première contribution pour eux de Nicky Hopkins sera We Love You (avec le bruit des portes de prison qui se ferment, et les Beatles dans le choeur). Et voir One + One pour son rôle dans Sympathy For The Devil.

Nicky Hopkins est indissociable des disques de la période de crête, Beggars , Let It Bleed, jusqu’à Exile. Il participera peu à la vie de tournée : la maladie de Crohn, qui lui gâchera la vie dès l’enfance et qui l’emportera à 50 ans. Il continuera pourtant ses enregistrements avec les Stones jusqu’en 1980... Ci-dessous la bande instrumentale d’Angie, avec Watts et Wyman, mais en amont de guitares et voix.

Il faut écouter le concert L.A. Friday en 1975 pour découvrir l’importance qu’a prise Billy Preston, celui qu’ont propulsé les Beatles (il est dans Get Back. Amusant de savoir que son énorme perruque afro cache un crâne chauve. Dans le milieu du concert des Stones, moment où on laisse se calmer l’affaire avec deux morceaux de Preston... accompagné par les Stones. Les Stones devenus de backing group d’un mercenaire... Richards dit qu’il finit par le virer lorsqu’il le voit arriver avec son ingé son. Mais, dans cette période trou d’air qui suit le départ de Mick Taylor, et Richards en permanence entre deux shoots, il fallait un point d’appui.

Les Stones ont dans chaque disque, et toujours à leur programme de scène, quelques morceaux lents. En 1971, ils découvrent la force supplémentaire que c’est d’avoir sur scène des cuivres, plus tard ils ajouteront un choeur (Lisa FIscher et Bernard Fowler totalisent chacun plus de vingt ans de Rolling Stones). Le statut de l’homme-clavier est alors démultiplié : en amont de sa propre partie d’orgue ou de piano, il est celui qui décide des arrangements, coordonne l’orchestre. Parce qu’on joue en grande formation, le jeu des deux guitares en avant sera plus libre, et Richards saura s’en amuser, trouver des contretemps.

Ronnie Wood (qui était avec Nicky Hopkins dans le Jeff Beck Group) amène avec lui, le pianiste des Faces depuis l’origine, Ian McLagan. Pas compris pourquoi, après 5 ans de bons et loyaux service, les Stones l’évacuent, et recrutent par audition pour la tournée américaine de 1981. Chuck Leavell, américain et 10 ans de moins, des Allman Brothers, décroche le poste. Trente ans après, il est le 5ème Stones dans la hiérarchie, avec le bassiste Darryl Jones, mais jour un rôle bien plus décisif : il est l’armature musicale de Mick Jagger, en contrepoint à Richards et Wood. Lui qui fait faire ses vocalises à Mick, place les choeurs, décide des cuivres. En plus, il chante. Tout ce dont avait rêvé Billy Preston, mais sa bonne tête rondouillarde et barbue (fini, le licenciement pour délit de bonne tête) reste sagement derrière l’orgue multi-clavier. Le décès de Stewart en fait l’homme indispensable.

Reste l’éviction du timide et frêle Nicky Hopkins, qui apportait avec lui l’authenticité du Marquee, et ses inclassables sons saturés et flottants. Grand Nicky Hopkins (écouter ci-dessous la première version de Sister Morphine, quand le piano semble attendre le futur solo de Ry Cooder). Il finit par s’installer en Californie, puis à Nashville parce que sa compagne y tient un restaurant. Pas riche, Nicky Hopkins, après tout ce qu’il a fait pour tous ces inusables titres des Stones, dont un seul suffirait à dix vies ? Ben non, il était payé à l’heure, cachet présence studio, et vous repasserez pour le reste.


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1ère mise en ligne et dernière modification le 18 août 2012
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