François Bonneau | Estacade de la Folie

#vasesco avec transformation de paysage urbain


Si les vases communicants durent depuis 4 ans, c’est qu’on n’a pas encore usé l’imprévu qu’ils nous donnent.

J’ai déjà échangé une fois avec François Bonneau (et, les 2 mois à venir, avec Brigitte Célérier et Piero de Belleville), ce que je n’aime pas chez lui, c’est que je vois s’écrire « François Bon » coupé à la fin quand il m’envoie un mail, Mais nous rapproche indissolublement le fait qu’il enseigne à Ruffec, ville tout proche de mon Civray d’adolescence.

François vivant à Poitiers, je lui avais dit mon souhait d’écrire sur cette aire d’autoroute de Jaunay-Clan qu’il accueille. Mais je ne m’attendais pas à cette réponse... Le samedi 22 mars, quittant Poitiers, je m’arrête devant ce panneau Accès zone Folie zone V2 et le soir je fais ce billet. Puis cet autre sur quelques photos du viaduc pour le nouveau TGV, prises directement depuis la voiture : pont avec suicide compris. Et voilà de retour ce rond-point et le pont, cette fois devenus véritable objet d’écriture. Et curieux échange, puisque fictions croisées sur le même réel.

 

François Bonneau | estacade de la Folie


J’ai déjà des rouages, de chair ferme et d’acier ; j’avance en ligne courbe, à en crever l’horizon. Je n’ai pas de vrai mérite, ma naissance ne fut que vitesse.

Je fais pourtant partie du sol, que j’aperçois en contrebas, que je surplombe et magnifie, je le vois défiler ; j’avance loin, vite et fort, on ne voit pas ma fin. Je file, de toute ma masse, traçant sur ce jeune siècle ma marque indélébile, que l’on suivra, si l’on peut. On m’appelle Estacade ; ça n’est pas d’habitude le nom d’un barrage ?

Estacade de la folie, voilà l’explication, et tout devient possible. En mon centre, deux tabliers manquants ? Du vide, entre des piliers ? Et cela devrait me stopper, moi l’Estacade de la Folie ? Que l’on ne s’y trompe pas, j’avance, et le chemin de fer qui avancera sur moi en fera tout autant. Avec la vitesse engendrée, je ne vois pas pourquoi un double saut ne serait pas possible. Qu’on imagine l’élan, la pente, le tremplin ainsi formé : un bond tout en souplesse, et c’est à peine si les voyageurs se rendront compte du doux atterrissage. J’ai hâte. Je voudrais du vent sur les ventres d’acier des longues locomotives, du vent qui déforme les sons, je voudrais que se retournent les parapluies, en contrebas, traverser le pays, les continents, et revenir sur les lieux de ma naissance.

Et puis recommencer, améliorant, toujours, le temps passé à parcourir la boucle.

 

 


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1ère mise en ligne et dernière modification le 4 avril 2014
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