
l’abécédaire paraît chez Grasset
Plus de 1100 livres mis en place après commandes libraires auprès des éditions Grasset, donc si vous ne trouvez pas mes Fragments du dedans c’est que vous ne devez pas être dans la bonne librairie... Le lien ci-dessous pour compenser en ce cas, ou si vous êtes à l’étranger :
présentation initiale
Écrire sur commande... non pas un article dans un livre collectif, ou une préface, mais tout un livre : mon premier réflexe c’était le non catégorique. Croire à ce qu’une nécessité s’impose en amont du livre, et puis se tenir prêt aux écarts les plus imprévus qui surgissent la route, pour 4 mois comme le Proust ou 4 ans comme le Lovecraft à venir.
Et quelle commande : réfléchir à la notion d’abécédaire, depuis celui de Deleuze qui nous a tous mis en tremble.
Mais c’est peut-être l’écart avec mes pratiques qui m’a poussé à accepter au moins le dialogue. Fait la connaissance de Jeanne Garcin, la responsable de cette collection « 26 », d’une telle rupture générationnelle il y a aussi à apprendre, et la magnifique couv du livre, la typo interne aussi, témoigne de cet écart et en quoi il peut être bénéfique.
Et puis, depuis les années Fayard avec Olivier Bétourné (et justement, si Olivier passe par ici, parce que jamais je n’aurais proposé un tel livre dans la continuité de mes précédents à Fiction&Cie), se sentir bien dans la façon de bosser de ces vieilles maisons du groupe Hachette.
Ajoutons qu’à la clarté de la commande s’ajoutait le viatique permettant d’y consacrer du temps, et qu’un autre élément c’était le collectif qu’une telle collection appelle – ce livre aurait pu et dû paraître en binôme avec celui de Pierre Jourde si ce n’avait été d’un drame dont son blog porte seulement la pointe discrète, sur abîme.
Éric Chevillard aurait pu en être aussi, mais il nous a brûlé la politesse en gardant l’exercice et le rapportant à domicile chez Minuit, ça fait rien : c’est bien la même recherche.
De mon côté, long temps de maturation avant de se lancer. Compris assez vite qu’il n’y aurait pas 26 mots mais un peu plus. N’aurais pas cru qu’ils seraient 130 ou 150 au final.
Su très vite que le premier serait abandon : écrire dans une logique d’abandon.
Su assez vite qu’ils se disposeraient de façon à permettre une lecture linéaire du livre. Quelquefois ça n’arrange pas : j’aurais voulu mot avant mort (du coup, c’est comme ça que je commence pour mot). Et j’ai triché en plaçant l’article autobiographie à W (mais il y a une raison !).
Ceux qui suivent ce blog savent que ce livre s’est écrit en ligne : défi d’une seule page html avec ancres internes, jusqu’à saturation ou explosion. Étrange exercice, puisque ainsi on n’a pas de trace du livre à venir sur son propre ordinateur, pas de fichier traitement de texte, et ça aide. A aidé aussi que plusieurs compagnons blogueurs (Brigitte Célérier, Philippe AIgrain, Pierre Ménard) se sont eux aussi engagés dans des abécédaires en parallèle, révélant la vigueur et la largeur de possibles d’un tel exercice.
Explorer non les choses, mais les mots : pour la première fois de sa vie, se retourner sur la brique élémentaire de l’écrit. C’était forcément pour moi une entrée dans le dictionnaire, donc le Littré inclus depuis 1999 sur le disque dur des mes Mac successifs. Mon manuscrit porte en exergue un extrait de l’article abécédaire de Littré, mais ça créait une redondance avec la phrase d’Yves Bonnefoy choisie par Jeanne Garcin pour exergue de toute la collection, je l’ai donc enlevée.
Après, l’autre contrainte de l’écriture, c’est lever les barrières qu’on dresse contre ou malgré soi.
L’écriture a duré d’août 2013 à février 2014, mais je ne l’ai jamais tenue de façon continue. Certains articles, dont je savais qu’ils représentaient un enjeu plus central, je les gardais pour la toute fin (rêves, roman). D’autres, je savais que s’ils comptaient beaucoup je devais les désamorcer par une phrase brève, et qu’ils reviendraient suffisamment hanter par la bande (réalité).
J’essayais, une fois qu’un fragment était bouclé, de ne pas relire. Ainsi, c’est Jeanne Garcin qui s’est aperçue, à réception du manuscrit, que j’avais écrit quasi deux fois le même texte, un pour photographie, l’autre à plafond. Et, même avec les corrections d’épreuves (merci à Marie Tillol, que je n’ai jamais rencontrée, rare de trouver une telle attention non contraignante, et compétence), il m’a fallu le train du retour, vendredi, pour découvrir que j’avais une entrée fric et une entrée sous, écrites à plusieurs fins de mois d’écart, qui faisaient un peu doublon. Mais pas de doublon pour pantalon, vodka ou des tas d’autres petites trappes que jusqu’ici je n’avais jamais osé ouvrir. Essayé de tenir ça à distance du contingent, le garder dans le chemin des jours, l’appel des lectures. Jamais écrit plus d’un bref bouquet de mots si ça venait en bouquet de deux ou trois, parfois longtemps attendu le rendez-vous avec un seul, mais jamais travaillé ce livre dans une continuité. Plutôt cet arrachement de soi, où on est tout entier dans la ligne qu’on trace.
Pour ça que je le sais maintenant, c’est pour moi non pas un travail de bord du chemin, la « commande » transgressée par l’intérieur, mais un livre en pleine continuité avec le triptyque du Seuil (Après le livre, Autobiographie des objets, Proust est une fiction), sauf qu’on ne se risque pas sur ces chemins intentionnellement ou volontairement.
Merci renouvelé à l’éditeur et l’équipe. Merci aussi pour le titre (de mon côté, ça s’est longtemps appelé Marabout bout de ficelle, je crois que dans la tête je l’appelle encore comme ça).
Pour l’instant, et pour la part de secret qu’est pour moi ce livre, je ne remets pas en ligne la page html qui en était ici le carnet d’écriture : dans les mois de bouclage, tout ça a été étarqué, complété, tendu comme de juste. Alors pourquoi pas des vidéos, quelques passages, en rajouterai les jours à venir...
FB
abécédaire | meurtre
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1ère mise en ligne 7 octobre 2014 et dernière modification le 27 octobre 2014
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