progression #1 | Perec, lieux où j’ai dormi

Tiers Livre, les cycles été 2021


 

#1, Perec, lieux où on a dormi


Ce sur quoi insiste la vidéo :

 dans la quête autobiographique de Georges Perec, il ne s’agit pas d’un jeu d’écriture, ou d’une simple contrainte formelle, mais cela part d’une nécessité incluant les éléments les plus graves de la guerre et de l’enfance : avoir toujours en tête cette gravité, cette potentielle importance, même pour décrire un ciel, une odeur...

 respecter, quitte à un peu d’humilité forcée, la consigne proposée, c’est se donner la possibilité que l’ensemble des exercices aille bien plus loin, c’est une demande à faire confiance que peut-être rien n’autorise lors d’un premier exercice, mais j’insiste et insiste sur la demande ;

 d’autant que cette demande est simple et claire : dix alinéas ou versets, d’une ligne et demi à deux ou deux lignes et demi maximum, chacun lié à une sensation précise d’un de ces « lieux où on a dormi » ;

 la contrainte de dix alinéas ou versets : bien sûr rien qui empêche d’en retrouver plus, ou de compléter votre contribution en plusieurs fois... mais ce nombre minimum vous contraindra à la surprise, à entrer dans la mémoire lacunaire, à accepter ce que l’écriture fera involontairement resurgir...

 la référence à Marcel Proust est essentielle dans la démarche de Perec : l’instant de l’endormissement, l’instant du réveil, ou les phases successives qui mènent soit à l’endormissement, soit à au réveil, sont des phases de transition de conscience : la réminiscence, la sensation d’appui à vos alinéas ou versets surgit précisément de cette transition de conscience, qu’elle s’efface ou qu’elle revienne — la référence au « j’ai dormi » y trouve sa vraie loi ;

 comment procéder ? lire bien sûr tout d’abord le texte de Perec, le temps préalable qu’il consacre à comment il va trier ces 200 items de son propre inventaire... les catégories spatiales, temporelles, ou thématiques... et vous, sur quel protocole allez-vous vous appuyer pour une enquête à laquelle la mémoire volontaire est bien insuffisante ?

 dans cette idée d’appui sur la sensation, croisé avec votre protocole d’enquête, plus qu’importante l’idée de tenir à distance l’autobiographique — j’y insiste : la phrase a commencé avant, la phrase continuera après... ce qui constitue l’alinéa ou le verset, bref fragment de prose d’une ligne et demie à deux lignes et demie, multiplié dix fois, c’est ce centre de gravité de la réminiscence, la sensation visuelle, olfactive, auditive, ou bien froid et chaleur et ainsi de suite, la déformation due à la mémoire lacunaire étant précisément le lieu de surgissement du caractère littéraire de ce qui s’écrit — une matérialité de la langue, séparée de son contenu informatif (c’était où, c’était quand, c’était avec qui, et pourquoi : tout cela on s’en moque, cela n’appartient pas à l’exercice) et séparée de ses éléments autobiographiques ;

 je redis ici cette phrase de Perec qui me sert d’appui « quel était le motif du papier peint à l’hôtel du Lion d’or à Saint-Chély d’Apcher », comme modèle précis de surgissement de sensations très précises, y compris dans le seul prononcé des noms, mais où l’absence même le réminiscence crée le contenu textuel...

 merci de remuer ça lentement et tranquillement, avant d’écrire vos dix versets...

 et bien sûr, la vidéo associée pour les participants inscrits au module formation de formateurs, et les documents d’appui via le lien transmis dans la lettre d’info.

 


responsable publication François Bon © Tiers Livre Éditeur, cf mentions légales
diffusion sous licence Creative Commons CC-BY-SA
1ère mise en ligne et dernière modification le 20 juin 2021
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