contribution auteur | Louise Lecarbet

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Née à Niort en 1970. Vit à Paris.

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proposition n° 3

Quatre légendes rapportent l’histoire de sa conception.

Dans la première, papamaman se déchaînent
sur un rock endiablé parce qu’ils ont
trahi leurs couleur et milieu, ils
s’envoient en l’air sur un air qui leur refile un enfant.

Dans la deuxième, papa, fuyant dans
le plaisir les remords de l’adultère qui le déchiquète,
s’enfonce de plus en plus profondément à
l’intérieur de maman jusqu’à ne plus faire
qu’un avec elle.

Dans la troisième, l’amour est oublié au
cours de l’été soixante-dix, les muscles maternels
se fatiguent, et, fatigué, le col de l’utérus
s’efface.

Reste l’inexplicable enfant— L’écrivain
tente d’expliquer l’inexplicable. Comme de vieilles légendes
peut naître un fond de vérité, il lui faut bien retourner tourner tourner tourner
à l’inexplicable enfant.

proposition n° 2

son geste et le dévisagea. Nicolas Rochefort s’interrompit à son tour. La table, et sur la table, la feuille, et sur la feuille, la sale petite ligne noire accidentée retinrent leur souffle d’objets à bout de souffle. Les regards prirent le relai du récit. Jamais encore dans la littérature des hommes, l’auteur et son personnage ne s’étaient toisés dans une telle absence de mots, de rythmes et d’images. Nicolas, tout à sa stupéfaction et Lazare, tout à sa résurrection. Et ils ne surent bientôt plus ni l’un ni l’autre comment reprendre le cours du temps, le cours des choses et du monde. Retourner à son stylo semblait dérisoire à Nicolas, impossible. Lazare, s’il baissait seulement les yeux y laisserait peut-être à nouveau sa vie, sa peau, sa toute nouvelle peau enveloppant parfaitement la pulsation des organes et des fluides, contenant la charge formidable des sens et des mémoires. Alors conjointement, mais sans décision notable de l’un ou de l’autre, ils se

proposition n° 1

Le palier rouge du premier étage, la grande chambre à droite, et face à moi dissimulant la porte du grenier, le rideau qui bouge sans que je ne comprenne jamais d’où vient le courant d’air qui l’anime.

Les deux chemises qui oscillent au loin, dans l’embrasure d’une fenêtre. C’est l’appartement qui fait face à cette salle d’attente où – justement - j’attends. Je les regarde, j’attends.

La vieille station-service à la sortie du village, près de l’étang. Peut-être était-ce juste un garage. L’activité ou plutôt l’absence d’activité m’intrigue encore, tout comme la peur qui saisissait. La peur, c’était l’étang, et le panneau barré indiquant la sortie du bourg, et la borne kilométrique avec les autres directions à prendre. On ne les prenait pas.



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1ère mise en ligne 21 décembre 2018 et dernière modification le 10 janvier 2019.
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