les matériels informatiques seront saisis

du décret qui instituait leur ramassage obligatoire


Ils nous avaient dit d’arrêter. Que ça y était, maintenant, assez joué.

Pour cela, ils avaient commencé d’envoyer les commissions de contrôle. On disposait de milliers de gens prêts, en fait, tous ceux qui restaient sur le trottoir : nous, on disait qu’on n’y était pour rien, que la crise de société était ailleurs, que nous prendre pour seuls responsables était une erreur, et puis qu’ils n’y arriveraient pas, il resterait des écrans dissimulés, des bornes d’émission sous les toits. On se débrouillerait avec le réseau électrique, on se servait déjà des téléphones.

Mais non, les camions passaient systématiquement. Ils avaient évalué à quatre mois la phase qu’ils disaient « de balayage ».

Dans la nuit, on protégeait ce qu’on pouvait, on mettait les appareils dans les coffres de voiture, sous des couvertures. Les petits appareils portables on les gardait sur soi, dans son sac. Ils n’avaient pas le droit, pour l’instant, de fouiller les sacs à dos : qu’on aille voir dans les gares, tout le monde promenait son petit appareil dans un sac noir à même le corps.

Ils avaient commencé par les grandes administrations. On prétendait que les entreprises privées s’y retrouveraient très vite : l’informatique était tolérée pour la production, mais tout ce qui était comptabilité, gestion, communication, on revenait aux registres, aux fiches. Les emplois surgiraient, on s’y retrouverait : tu parles.

Quelquefois, on en riait : leurs prises qui s’accumulaient sur les trottoirs, on avait chacun, chez soi, dans le garage ou les placards, de quoi leur en fournir quelques mètres cubes.

On se dissimulerait, oui, mais on tiendrait.


responsable publication François Bon © Tiers Livre Éditeur, cf mentions légales
1ère mise en ligne et dernière modification le 25 novembre 2008
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