ou de la bibliothèque que nous sommes, tautologies
Je ne me permettrais pas de reproduire un e-mail d’invitation à participer à un colloque, qui n’en est à sa phase de gestation. Mais justement, j’y réponds dans cet esprit, en réfléchissant à mi-voix.
la question posée
Représentations de la bibliothèque dans la littérature contemporaine, projet de colloque
A partir d’un corpus volontairement ouvert à la diversité des productions
contemporaines, ces journées d’études se proposent donc de
croiser ces différents regards autour de deux grandes orientations
problématiques elles-mêmes complémentaires :
– Quels imaginaires de la bibliothèque ces oeuvres proposent-elles et quels
rapports (de rupture ou, au contraire de continuité) ces imaginaires
entretiennent-ils avec ceux dessinés par les générations précédentes ? Que nous
disent-elles de ce qui fait la spécificité du rapport qu’entretiennent les
écrivains d’aujourd’hui avec les bibliothèques tant privées ou personnelles que
publiques ?
– Les images que nous offrent ces textes sont-elles la mémoire d’une époque
révolue ou, au contraire, le témoin des mutations en cours tout au long de la
fin du XX°siècle ? Qu’éclairent-ils ou qu’occultent-ils des pratiques et
représentations aujourd’hui en vigueur, telles qu’historiens et sociologues
peuvent les donner à connaître ? Et que disent les écrivains d’eux-mêmes et de
leur inscription dans le social à travers cet imaginaire de la bibliothèque
qu’ils mettent en oeuvre dans leurs textes ?
On se proposera d’explorer en particulier - sans que cette liste soit en rien limitative - les pistes suivantes :
– Bibliothèque(s) et imaginaire(s) de l’espace
– De la bibliothèque-monde à la bibliothèque ruinée
– Ecrivain, mémoire et bibliothèque
– Haine des bibliothèques ?
– Figuration(s) de l’écrivain en bibliophile.
tentative d’écho personnel
[...]
merci d’abord de ce message, et de l’invitation
nous autres on n’est jamais très à l’aise dans ces colloques et on les pratique finalement peu
mais surtout, pour ce thème, c’est la tautologie ou la redondance qui rend cela difficile : on vit dans une bibliothèque, il n’y a même que là, dans sa bib personnelle, qu’on est bien, on écrit par dessus le dos des autres livres, et pour finalement y ajouter 1 cm d’épaisseur de bouquin
le singulier “la” bibliothèque est certainement aussi un paradoxe - cela n’a rien à voir, la bib municipale de Bobigny un samedi en journée (fichier ci-joint, un peu ancien), de toucher la rature “soleil cou coupé” d’Apollinaire au dpt manuscrits de la BNF ou d’en explorer les réserves du sous-sol (texte fait en 2000 pour la BNF dpt Sciences, autre fichier ci-joint), et l’empilement des bouquins jusqu’au plafond dans ce fichu garage d’où je vous écrit, et qui n’est pas bien confortable l’hiver avec les courants d’air
la tautologie est plutôt à l’intérieur, par le fait qu’on bascule dans le monde des livres qu’on porte soi-même au-dedans dès lors qu’on écrit - à preuve : je connais peu d’auteurs vraiment bibliophiles, et ce serait par exemple vraiment bien que vous sollicitiez Pierre Bergounioux, dont la maison elle-même est classée en bibliothèque - nous serons ensemble à Beaubourg le mercredi 7, 19h30, Revues Parlées, pour ma part je n’ai aucune tendance bibliophile, même si ma boîte à outils sous forme de quelques centaines de Pléiade m’est d’un usage quotidien
de la même façon, les auteurs que nous lisons, de Flaubert à Michaux ou Proust ou Nerval et Gracq et tant d’autres, nous savons par coeur leurs propres bibliothèques (on a même les listes de livres, pour Kafka, pour St John Perse, pour Perec et d’autres), et là encore pour nous ce n’est pas séparable, on découvre les livres par la lecture que nos aînés en ont faite
et tout ça bien sûr bouleversé de fond en comble par le numérique, expérience qui me requiert désormais dans la totalité de mon travail (même la bibliothèque peut y être avalée)
je serais donc bien empêché de faire une “communication” ou intervention sur ce thème et dans ce cadre, tout simplement parce que rien n’y est séparable du travail quotidien, du temps même : moi chaque jour je m’endors quasiment via hypnose sur une page d’un livre, et c’est mon sas obligatoire pour travail perso
je serais plus tenté, éventuellement, par une lecture de textes liés à ce rapport à la bibliothèque et en quoi c’est là que se creuse le vide nécessaire au travail, en voilà quelques récents :
à chacun de répondre selon sa bibliothèque ?
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1ère mise en ligne et dernière modification le 1er décembre 2005
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