#rectoverso #02 | Melancholia

Recto

à ce stade de la nuit, je ferme à clé la porte d’entrée, à ce stade de la nuit je me pose la question, surgit comme un éclair, ai-je bien fermé la porte d’entrée, à ce stade de la nuit je m’explique sur le fait que oui je ferme à clé la porte d’entrée non pas parce que j’ai peur d’une quelconque intrusion mais parce que la porte d’entrée est loin de la chambre et que je dort mieux en délimitant ainsi un espace dans la nuit, à ce stade de la nuit je constate que la porte d’entrée de l’appartement est plus éloignée de mon lit que le jour, à ce stade de la nuit je marche dans l’appartement semi obscur comme je traverserais un dédale en direction de la porte d’entrée, à ce stade de la nuit je déambule, je me cogne le petit orteil dans le coin du buffet de la cuisine 

Verso

Je sors de l’appartement, descend l’escalier en colimaçon, j’aime la forme de cet escalier, que la main sur la rampe me donne l’impression de voler, il est plus facile de descendre sur le côté le plus large des marches. Je suis dans la rue. Dans un sens puis dans l’autre les passants sur un trottoir puis sur l’autre rentrent chez eux ou en sortent en cette fin de journée, les épaules plus lourdes que ce matin. Le cinéma est juste à quelques pas de mon immeuble, je songe souvent à m’y rendre chaussé de chausson, comme à la maison passer de la chambre au salon. Le MK2 bibliothèque, je prend mon ticket directement à la machine, l’écran est rempli de marques d’empreintes de doigts. Nous attendons quelques minutes dans le couloir. J’entre dans la salle, dis merci à la personne qui me retient la porte avant de la tenir pour la personne suivante qui me dit merci à son tour. Les meilleures places sont prises, je m’assois au centre de la salle, peut-être suis-je au centre, je n’ai pas compter le nombre de rang devant et derrière moi, si le nombre est le même je suis au centre, je me retourne, il semblerait que je sois placé à peu près au centre, combien y a t’il de sièges à gauche et à droite ? Après les publicités commence Melancholia de Lars Van Trier. Les lanternes de papier montent dans le ciel, incandescentes,  glissent dans la nuit.

A propos de Romain Bert

J'écris pour mieux lire.

2 commentaires à propos de “#rectoverso #02 | Melancholia”

  1. Merci Romain! j’aime le précis, le visuel, le détail de ces textes, et cette espèce d’angoisse répétitive sur la porte puis sur le centre de la salle, on est vraiment dans le décor et le mental du personnage. Merci!

  2. …j’aime ces phrases courtes et précises et surtout ces interrogations très concrètes mais tellement révélatrices de ? … la porte fermée, se situer au centre ou pas, compter… Merci!!