#rectoverso #04 | on n’y peut rien

Déjà là à peine arrivé ici bas…partenaire d’une vie à jamais inséparable jusqu’à ce que la mort nous sépare dit-on…un serment? non une évidence…une certitude…c’est ainsi pas moyen de faire autrement…toutes les tentatives, toutes les ruses pour y échapper n’y feront rien…on doit faire ensemble notre bonhomme de chemin. Au début, c’est discret, imperceptible et pourtant déjà à l’oeuvre, agissant par petites touches légères. On n’y prête pas attention emporté par le mouvement vivifiant de la vie. On s’ignore complètement, on se dit qu’on se reposera plus tard, qu’on verra ça le moment venu. Il y a plus urgent à faire, des projets à réaliser, des liens à bâtir, des amitiés à consolider, une postérité à assurer, du bon temps à prendre, des horizons à découvrir, bref une foultitude de choses à accomplir avant de s’intéresser l’un à l’autre. Mais insidieusement tu te fais plus insistante. Tu perturbes mon sommeil qui n’est plus aussi bon qu’avant. Tu essaies toujours les mêmes stratagèmes pour me réveiller la nuit. Le matin en me regardant dans la glace, je me dis que tu fais du bon travail…un chef d’oeuvre d’orfèvrerie. Jadis, je passais comme dans un éclair dans la salle de bains. Aujourd’hui ça devient une pièce à vivre. La tablette s’alourdit de crèmes de d’onguents divers. Dans l’armoire à pharmacie, il n’y a plus de place pour une boîte de sparadraps…bref tu te fais de plus en plus envahissante. J’ai rajeuni ma garde-robe en me débarrassant d’oripeaux passés de mode. Maintenant je me contente de peu, faute de mieux, faute de goût J’ai dû prendre une routine, à apprendre à aller à l’essentiel, à préférer les enfantillages. Je vais moins vite parce que tu me le demandes, les choses autour de moi ne sont plus aussi nettes. Pourtant il y a peu, je regardais à peine ces détails qui m’entourent et que j’aimerais bien mieux voir à présent. Ma vie est faite de petits riens qu’il y a peu je considérais futiles. Tu me forces à regarder en arrière pour mieux apprécier le chemin parcouru depuis que nous nous sommes rencontrés. Bien sûr, nous allons continuer notre chemin ensemble même si je sens ta présence de plus en plus pesante. Comment faire pour la soulager? tu ne me dis rien…tu me fais comprendre qu’il n’y a rien à y faire…c’est la vie c’est comme ça. Je sens que tu m’entraîne vers une issue qui ne peut que mener à un naufrage.

A propos de Laurent Damerval

En quête de mots à trouver et d'histoires à réinventer

2 commentaires à propos de “#rectoverso #04 | on n’y peut rien”

  1. C’est très émouvant ! Et je n’arrive pas à savoir de qui ou de quoi tu parles, ce qui rend le texte encore plus intéressant !

    • je parle de la vieillesse qui nous étreint dès la naissance et que chacun vit et ressent différemment. Quoi qu’on fasse, on ne s’en débarrassera jamais…L’emprise est bel et bien là. Merci pour le commentaire