14 juillet matinée radieuse d’un siècle chancelant
RECTO
10 heures et vingt minutes. Un lac, des arbres, deux cygnes et leurs petits. Autour, des marathoniens transpirent. Des enfants bruyants, des amoureux enlacés dans l’herbe écrasée par le désir. Tout est calme, reposant. En paix.
10 heures et vingt cinq minutes. Affolement sur l’eau. Les canards, les oies, le héron, les cygnes, et les petits de tout ce petit monde dans un même élan vers la petite ile refuge au milieu du lac. Les marathoniens transpirent, les enfants rient, les amoureux toujours ailleurs. Tout est encore calme. Les animaux, eux, ont entendu, ont senti.
VERSO
10 heures et trente minutes. Des marathoniens continuent de s’époumoner. Les enfants ont soudain peur, les amoureux sursautent. Les regards se tournent vers le ciel. Le bruit fracassant vient de là. Du ciel. Un vrombissement comme un vomissement. Un défilé de carcasses volantes qui passent en rang d’oignons au-dessus de leurs têtes. Une parade qui fait peur n’est pas une parade, c’est une propagande. Militaire.
RECTO
11 heures et douze minutes. Le lac. Quelques pins parasols ébrouent leurs branches. La chaleur n’épuise pas les coureurs. Le bruit de la peur non plus. Les amoureux ont disparu. Les enfants ont repris leurs jeux et leurs cris. Seul le héron, sorti des buissons, part en repérage sur les hauteurs d’un arbre mort. Tout est à nouveau calme, reposant. En paix. Pour combien de temps ?
*adaptation enregistrée février 2024 de la chanson le déserteur Boris Vian février 1954
Nous étions sous le même vacarme, près du lac, en vélo rue de Rivoli. Il était 10h30 ? Les premiers, ceux qui font bleu blanc rouge, ça va. Les suivants, je me suis demandé pour montrer quoi, effrayer qui ? massacrer qui ?
…oui..pourquoi?…
merci d’être passé …près du lac!
Merci Eve pour toute l’émotion contenue dans si peu de mots, ces images qui frappent, des moments où la violence se profile sous couvert de normalité. Bonne journée et à plus tard.