RECTO
le cercle devant, des personnages flous se croisent, c’est vert. Il tombe. Le grillage tremble encore un peu. On n’aperçoit rien de ce qui se pointe. Ciel rouge, quelqu’un avance, tend la main, donne à manger à un pigeon, me regarde. Derrière, les feuilles des arbres bougent également. Le parc est vaste, première fois que j’y mets les pieds. Y suis arrivé par hasard, même pas sûr d’en connaître le nom. Il ressemble à un souvenir, surtout ces mélanges de rouge et de vert qui, pour une raison obscure, m’obsèdent. La pierre explose en des milliards de fenêtres. Les volets se ferment, je relève mon nez de la poussière et je crie. Une femme se penche sur moi, un clignement de l’œil, je suis de nouveau assis sur mon banc. Les arbres défilent et tanguent lorsqu’ils heurtent les ombres. Une statue, face à moi, chuchote, mais j’ai l’impression que ça fait mal, comme si elle me mordait le tympan. Je serre les dents, ça finit par passer. La femme penchée sur moi me demande mon nom, « Humphrey », et me demande si c’est tout. Une branche casse, les képis passent. Ne restez pas là qu’on me dit, mais elle explique qu’il ne faut pas bouger trop brusquement. Le serre les poings pour attraper les vagues, l’écume qui brise mes cheveux.
VERSO
l’œil ne voit que deux couleurs, le vert et le rouge. il compose avec. Les formes naissent de leurs connexions, voire des chocs. Elles ne se croisent jamais, mais s’entêtent et se collent l’une à l’autre pour extraire la sève qui colle de leurs nœuds. Au-delà, tout est noir et clair. Alternances de nuances fortes. Je reconnais par la voix, car les images peinent à se stabiliser. Les sens sont effrayés par la douleur. On ne peut saisir aucune image fixe, car dans ce monde-là elles ne sont pas conceptualisées. On n’appréhende que l’entre-deux, le moment où le soleil n’est ni couché ni levé : il n’émet aucune lumière, mais est pourtant bien là. La voix me rattrape et agit comme un catalyseur sur la vue qui peut dès lors percevoir ce que les images refusent de révéler. L’œil entend ce que l’oreille voit et inversement, l’audible garde l’esprit non-fou même dans la plus féroce contradiction. Vignettage ridicule autour des couleurs, il correspond à la focalisation du son. L’effet Doppler déforme les images et attire vers une longueur d’onde qui n’existe pas ici, trop grave. Sauf que je la sens, moi, dans tout mon corps, c’est ce qui me permet de la voir.
de Doppelt à Doppler … Ce parc qui ressemble à un souvenir . Ces images et ces perceptions qui se télescopent ou se relaient comme en rêve. Merci
Je n’avais même pas fait le rapprochement avec Doppelt ! Mais ce n’est sans doute pas un hasard 🙂
Très belles visions dans le recto et présence des perceptions « effrayés par la douleur ». C’est très fort
Merci ! La pression de l’écriture mène à des choses inattendues…