La brume est tombée rapidement, la nuit m’a surpris dans le champ, absorbé que j’étais par ma trouvaille. Avec mon bâton de marche, je ne crains pas les chiens de Ker Isabel, ils aboient, mais si je gueule un bon coup, ils se ratatinent et se contentent de geindre jusqu’à ce que je m’éloigne.
Le faisceau de ma lampe torche faiblit. J’ai atteint les premières maisons du bourg. Voilà, les piles sont mortes, je n’en ai pas de rechange. Tant pis, pour ma prochaine visite, je serai plus attentif. Ce sera après Noël, les jours rallongeront. Le café est toujours ouvert, îlot républicain en milieu hostile. Sa lanterne me sert de phare. Elle me guide à travers le village endormi. À tâtons, je contrôle l’état du chemin, le temps est sec ces derniers jours, pas d’ornières. Voilà, encore quelques pas et je serai bientôt à l’abri du froid dans ma tanière. C’est la seule que j’ai trouvée en septembre, l’école publique n’a pas beaucoup d’amateurs ici. Alors je loge chez le mécréant du village. Et encore, je suis un homme, ils l’ont joué fine à l’académie, ils n’essayent plus de muter une femme, maintenant, ils les envoient par couple. Sauf cette année, pas de volontaires, faut dire un appartement de fonction qui brule c’est rare. Sauf moi, j’étais volontaire, libéré des obligations militaires et amoureux des mégalithes ! L’arrière-cour est pleine de vieilleries métalliques, de barriques, vides pour la plupart, Fanch fait de bonnes affaires. Mais oui, le corniaud, pas la peine de grogner, c’est moi, le locataire de la mansarde. Oui, c’est ça, c’est ça, t’es un bon chien. Ce que tu es lourd, redescend, tu vas salir ma veste. Qu’est-ce que je viens de reverser ? Et m… c’était une bouteille de tord-boyaux, vide heureusement, consignée évidement. Au revoir petits centimes, le mois commence à peine et je dilapide mon salaire, le taulier est impitoyable. J’ai dû me couper, je sens que je saigne. Qu’est-ce que je fais ? Je vais me coucher directement ou je passe saluer la compagnie de poivrots, les piliers du bar de Fanch ? M’ont-ils entendu ? Peut-être pas, j’hésite. Si j’y vais, même si je prends juste du café demain les pipelettes vont raconter partout que je bois. Si j’attends encore, Fanch va sortir avec son fusil pour effrayer l’intrus qui prétend lui piquer son vélo. Je fais quoi ?
Hâte de lire la suite! et de savoir pourquoi et comment le logement de fonction a brûlé.
Merci George pour ta visite et ton commentaire. Et oui, pourquoi a-t-il brulé ?