#rectoverso #13 | la peur l’élan la mer

RECTO

Il y a la peur attendue, reconnue, un instant suspendue par les mots qui la tracent.

De la houle brume la phrase émergée par jambages

Et l’envie de s’en approcher

On aborderait par le commencement et par la douceur La bercer, contourner, amadouer On s’enquerrait quelle peur ? L’écho quelle peur eur eur …

la peur, inchangée, confuse, isolante, régnante

Sans bruit, on irait se poster de l’autre côté Qui la tracent qui la tracent Tracer, tirer, traîner. La trace laissée. Qui tire ? Qui trace ? Qui laisse? Qui lâche ? Qui ?

la peur est une huître dans un pays sans couteau.

On s’enhardirait à franchir la passerelle entre les deux rives de la phraseUn instant suspendue câbles filins courbure, ni ici, ni là, entre deux, très hautLe brouillard épaissi, rien autour, silence On le griffe des bras, des jambes, une danse au-dessus du vide, y aller

la peur au présent, une peur de croisement des images et d

la peur et l’envie corps à corps sur le pont épuisées tenaces regagnent sa rive chacune sussurer dans la fatigue, une peur comme une sœur, l’instant élan

Il y a la peur attendue, reconnue, un instant suspendue par les mots qui la tracent.

un cri Un cri fort Pe sus pe Ue ue ue ue Asse asse Et encore Pe sus pe Ue ue ue ue Asse asse Eu Uuuuu Asss

plus fort encore et encore Peu, si peu Ue, ue, à hue Asse je passe Asse filasse finasse

noue le fil de la peur à la trame de la page et

VERSO

Il y a toutes les mers, il y a la mer en mascaret sur la page.

Sach : Mascaret. Le phénomène correspond à une brusque surélévation de l’eau d’un fleuve ou d’un estuaire à morphologie convergente de type « hypersynchrone », provoqué par l’onde de la marée montante lors des grandes marées

Viv : Marée, marée grande, montante, montante

Ecr : En mascaret , vraiment ?  

Il y a toutes les mers, un mascaret sur la page

V: Toutes les mers, toutes, Toutes les plages sur la page

E: Emporte la page

S: La mer d’Aral d’Azov de Chine caspienne noire

Le chœur : La mer sable chaud, la mer enfance La mer à S Thala la mer à T Beach La mer violence Issue et repli, silence

S : Le mascaret atmosphérique peut servir de déclencheur à la convection atmosphérique en soulevant l’air au-dessus de

E : Dérouler le mascaret Attention impasse

V : Oter le masque carré

Le choeur : Abattre les masques

S : Avant d’entrer dans l’eau le surfeur opère une lecture des vagues

E : La mer comme continuité motrice

S : Un continuo

E : Pour quel dessus ?

A propos de Anne D

Arrivée en écriture par le paysage et l’architecture, Anne D ouvre les ateliers de Lignes vives aux marcheurs, aux soignants, aux cabossés de tout marteau, avec lesquels elle partage ses nages en littérature pour soutenir des regards singuliers et aviver une écriture sur place et à emporter, celle des autres et la sienne.

18 commentaires à propos de “#rectoverso #13 | la peur l’élan la mer”

  1. le crescendo dans le verso donne un sentiment de suspension , une attente vers … et la chute …superbe, merci

  2. Très belles images : Mascaret, onde dans surface page qui aligne versus peur espace qui destructure. Merci Anne !

  3. litanie des mers océan Roche Noire « La mer comme continuité motrice » Merci pour ces images mouvement

    • Merci, la litanie revient par vague dès qu’on m’invite à quelque chose…mais pour les Roches Noires c’est trop haut !

  4. Beaucoup aimé les passages sur et autour de la peur, vaste sujet, si fort et fragile à la fois.

    noue le fil de la peur à la trame de la page et

    Et ces phrases qui ne s’achèvent pas complètement, qui restent dans un souffle, une respiration, comme en apnée.

    Merci Anne.

  5. chez toi aussi, Anne, il y a la peur, la vague
    un instant on est suspendus
    « à franchir la passerelle entre les deux rives de la phrase »

  6. Merci Anne, texte très inspirant! Même si c’est la mer, il y a quelque chose du passeur qui nous fait traverser vers un territoire où la peur devient familière (comme une soeur), presque intime.

    • merci Michael, et toutes et tous de vos retours, j’y arrime l’envie de dépasser ce stade du cri jeté à la page pour composer plus avant.

  7. « la peur est une huître dans un pays sans couteau », ça c’est magnifique.
    Comme sont magnifiques ces va et vient, comme la marée, entre peur, page, plage, entre les rives du mots. Merci !!

  8. Cette odeur de brume d’abord, et la petite peur dans la houle, attrapée au filet des mots.
    Ensuite le flux et reflux du mascaret, l’observer et enjamber la grande peur, chercher le couteau de ce pays d’huitres…

    Très beau !

    • merci Yael. Pour l’instant le mascaret est à l’arrêt…et les 2 dernières # encore dans la brume. Bonne suite de ton côté !