
Printemps des Poètes, répétition, plus l’hommage Tinguely de Jacques Darras
Très bref, parce que journée (une de plus) dans une salle de théâtre vide, la gigantesque salle du théâtre de la Cité internationale.
Demain, on recommence, lectures, montages, distribution, essais dans l’espace. L’idée de Claude Guerre, c’est trois "sets" qui se dérouleront successivement et simultanément dans les 3 étages du théâtre, Zéno Bianu tout seul en haut pour "dialoguer avec les morts qu’il convoque", et tout notre petit groupe alternant selon les textes en haut ou en bas.
En haut, la salle de la Coupole, on se retrouve dans les architectures connues, hors l’usage du micro dont Claude fait chaque fois création et scénographie. Mais en bas, une "cave" gigantesque trou carré où Claude a dressé une table à l’échelle du lieu. Nous on lira sur la table, entouré de graphistes qui traceront à mesure sur les murs, au sol ou sur les galeries des bribes de ce qu’ils auront entendu.
Les textes vont de Villon, Rutebeuf ou Hélinand de Froidmont à Novarina, Koltès, Beckett. Claude Guerre est partout pour arpenter, impulser.
Mais la leçon, pour moi aujourd’hui, dans ces heures d’avant la vraie heure, où on ne saura plus rien, et où à peine on croisera et entendra les autres, c’est de découvrir chacun dans son mode de travail, d’appropriation de l’espace.
Ainsi, Irina Dalle. On la remercierait, de ce qu’on peut ainsi pirater pour soi-même. Ainsi, évidemment, Daniel Znyk, maintenant à la Comédie Française, mais toujours aussi atypique (sa façon de lire les Paroles Gelées de Rabelais, ou Bing de Beckett). Ainsi, Alan Fromager, avec qui je lirai Novarina et qui lira un fragement de mon Impatience, ou la façon qu’a Cécile Garcia-Fogel de chanter la poésie a cappella..
Sans doute pour ça que je ne serai jamais vraiment auteur "de" théâtre, ni "du" monde du théâtre, voire même jamais spectateur de théâtre : je ne les aime jamais tant, les théâtreux, que lorsque le texte, le corps et l’espace s’affrontent dans la pureté des trois disciplines en collision, parce que c’est mis au strict service du texte.
Et puis ceux du métier. Je connaissais Serge Pey et Jean-Pierre Verheggen, je suis lecteur de Jacques Darras depuis longtemps, mais je ne l’avais jamais vu (ainsi, à un mètre de sous mon nez) littéralement danser sa poésie, photo du haut. Venez demain, il y a Jacques Darras qui danse, et Daniel Znyk une fois de plus soulevé de terre par son papier (la preuve, je l’ai vu, ci-dessous). Le texte qui le fait ainsi décoller ? Tinguely, l’hommage Tinguely de Jacques Darras, je vous le mets après la photo...

Quelle quelle quelle quelle - il faut que je fasse démarrer l’admiration au starter
Un peu froide ce matin l’admiration devant son triptyque de la Roue mystique
Dis-donc l’Agneau file-nous un peu de ton suint pour donner du jeu aux bielles
Ah les belles bielles ah les belles bielles ah les belles bielles c’est presque parti
Ça y est les molettes les molaires les volants les moyeux et surtout les
Tringles les tringles les tringles les triangles les triangles les courroies les cour
Roies les roues des courroies qui entringlent qui entraî-nent le train des tringles
Le train des tringles partira à onze heures au quai 7 au quai 7 au quai 7 au quai
7 au quai 7 au quai 7 il roule il roule il roule Tinguely Tinguely Tinguely Ting
uely Tinguely Tinguely n’est-ce pas extraordinaire comme le nom de Tinguely
Tinguely roule roule roule tout seul tout seul comme s’il était monté sur roues
Comme s’il était programme mécanique de lui-même comme si lui Tinguely
Comme si lui était la Suisse à lui seul la mécanique horlogère jurassienne
Jurassique suisse mon petit Tinguely mon petit Tinguely oui papa Calvin oui
Papa Calvin oui Papa Calvin oui Papa Calvin oui Papa Calvin va dans les bois
Mon petit Robinson mon petit Robinson mon petit Robinson suisse retire-toi
Dans les bois dans les bois dans les bois autour de Bâle autour de Bâle autour
De Bâle et mets-toi à construire des moulins mets-toi à construire des moulins
Oui papa Don Quichotte oui papa Don Quichotte quels moulins quels moulins
Quels moulins des moulins à papier des moulins horlo-gers des moulins à farine
Des moulins d’arachide des moulins d’arachide des moulins d’arachide arrache
Toi arrache-toi arrache-toi à la répétition Tinguely construis des moulins à eau
De jolis petits moulins à eau que tu installeras mon Rousseau oui mon Jean
Mon Jacquot mon Jean-Jacques Ruisseau sur le bord des courants des torrents
Des courants des torrents qui coulent coulent leurs belles oui leurs belles belles
Bielles brillantes de liquide oui mon Jacques oui mon Jean dessine-moi une Méta-
Harmonie harmonieuse de machine-aube marchant à l’eau sans vapeur d’eau
Une mécanique d’imprécision qui m’aime me suive me suive
Qui même me Suisse la grande roue universelle laiteuse et galaxique du Temps
L’immense roue illuminée avec ses étoiles et son chocolat fondant mécanique
Puisque le Temps est une pâte extensive de noisette forestière que dilue
Musicalement l’adjonction d’eau oui mon Tintin mon Tintinnaguely donne-nous la recette
Donne-nous la cassette enregistrée des mirabelles mirabielles du paradis.
© Jacques Darras
1ère mise en ligne et dernière modification le 3 mars 2005
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