ruse
l'usage du mot : Georges Perec

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ou un autreTumulte au hasard  : c’était le plus souvent Hambourg

La ruse, c'est ce qui contourne, mais comment contourner la ruse ? Question-piège, question-prétexte, avant le texte, et pour chaque fois retarder l'inéluctable moment d'écrire. Chaque mot que je posais n'était pas jalon, mais détour, matière à rêvasser. Pendant ces quinze mois, j'ai rêvassé sur des mots-méandres, comme, pendant quatre ans, sur le divant, j'ai rêvassé en regardant les moulures et les fissures du plafond.
Là-bas comme ici il était presque réconfortant de se dire qu'un jour les mots viendraient. Un jour on se mettrait à parler, on se mettrait à écrire. Pendant longtempos, on croit que parler cela voudra dire trouver, découvrir, comprendre, comprendre enfin, être illuminé par la vérité. Mais non : quand cela a lieu, on sait seulement que ça a lieu; c'est là, on parle, on écrit : parler, c'est seulement parler, écrire, c'est seulement écrire, tracer des lettres sur une feuille blanche.

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François Bon © Tiers Livre Éditeur, mentions légales
1ère mise en ligne et dernière modification le 10 mai 2005
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