Recto
En marchant.. en écrivant, mais le titre est déjà pris.
Que dire du truc qui ‘s’écrit dans la tête’ pendant que le souffle court après la pente, que l’esprit enjoint la mémoire de s’en souvenir. On n’a ni carnet, ni feuille de papier, et le téléphone ne saurait jouer ce rôle de preneur de notes. Il y a bien des mots, les faciles qui viennent tout seuls à l’esprit, se retiennent sans difficulté, puis semblent si légers, si inadéquats, si impropres à ce que là, à ce moment, l’esprit écrit, sans contrôle, machine lancée, irrépressible, indomptable désir de dire, sans espoir d’être entendu. Alors, on accélère le pas, pour ne pas oublier, on se dit qu’on se jettera sur le clavier dès la porte passée, que, forcément, ce sera encore là, présent dans cette mémoire qu’on prétend immédiate.
Se souvenir.
Rassembler les mots.
Les obliger à traduire.
échec.
Rien ne va, rien ne colle.
Ce n’est pas ça, non, ce n’est pas ça que je voulais dire.
Ils vont rien comprendre.
De toute façon, ils lisent pas.
De toute façon, je ne leur donne pas à lire.
Je planque tout, tous les textes, toutes les sensations, toutes les impressions.
Verso
- Tu avais dit que tu nous ferais lire.
- Je suis pas prête.
- Allez, ça fait des années.
- Peut-être, pas prête je vous dis.
- C’est secret, c’est ça ?
- Pas du tout. Juste pas prêt.
- Que te reste-t-il à dire que tu n’as jamais écrit ?
- Rien sans doute. Tout aussi. Suis arrivée à un point…
- Ce point là, oui.
- Alors ça bloque.
- Tu veux de l’aide ?
- Pardon ?
- De l’aide, pour débloquer.
- Jamais.
- Il y a aussi plein de cahiers, avec encore des pages blanches à la fin. J’ai de quoi remplir, je crois.
- Ça, on peut lire non ?
- Illisible. Trop de voix, trop de voies, de détours, de dérivations.
- Tu t’es perdue ?
- C’est comme un labyrinthe sans sortie, un dédale enchevêtré, une jungle.
- Marche encore.