RECTO
J’ai toujours eu des relations épisodiques, formelles, virtuelles voire distendues avec cette digne administration qu’on nous envie tant, paraît t-il, et que l’on nomme familièrement la Sécu. On dit des français qu’ils sont très attachés à cette institution et qu’ils sont près à de gros sacrifices pour la conserver. Pour moi la Sécu ce sont les retenues sur les salaires, la dispense d’avances de soins chez le médecin conventionné de secteur 1 et le reste à charge, payé par la mutuelle, à condition d’être à jour de ses cotisations. En réalité j’ai eu plus d’échanges avec la mutuelle qu’avec la Sécu. Je me suis déplacé plus souvent auprès de ma mutuelle qu’à la Sécu. Ajoutons qu’il y a bien trente ans où je n’ai pas mis les pieds dans un centre de Sécurité Sociale. Je n’ai aucun souvenir du dernier agent de la Sécu que j’ai pu rencontrer. Etait-ce un homme? une femme? jeune? âgé? Bref c’était un monde à redécouvrir surtout après un long séjour à l’étranger. La prise de rendez-vous physique s’est faite par le biais d’une plate-forme d’appel, au 3649. J’ai tapé les 15 chiffres de mon numéro d’assuré social, suivi de dièse et une voix féminine m’a invité à choisir une option au moyen du clavier. Touche 2 pour un rendez-vous…musique et annonce du temps d’attente avant une mise en relation…temps d’attente estimé à trois minutes. Effectivement…Brêve sonnerie et une voix féminine, jeune, avec un accent de « cité » assez prononcé déclinant son prénom « Jessica » à mon écoute à qui je demande les papiers à fournir pour une réouverture de droits à la Sécu. Je note consciencieusement sur un papier les justificatifs à apporter le jour du rendez-vous. On me conseille vivement d’arriver au moins 5 minutes avant et de bien avoir tous les documents suivants : dernière facture, justificatif de domicile etc…je n’ ai rien de tout ça pour le moment car je reviens en France et je suis hébergé provisoirement chez des proches. Dans ces conditions, il faudra se munir d’une attestation d’accueil/d’hébergement à télécharger sur le site du gouvernement (c’est gratuit) à remplir et signer par l’hébergeur et revenir plus tard avec une facture intégrale de téléphone ou d’énergie à mon nom, c’est à dire avec le détail des consommations pour attester d’une présence effective et durable en France. C’est bien noté. Je peux les envoyer par internet? non il faudra prendre un autre rendez-vous.
La maison du service public de ma commune est un bâtiment assez austère qui abritait jadis l’administration du Trésor Public. C’est un bâtiment datant des années 80, tout en longueur, de plain-pied, avec de larges baies vitrées, à simple vitrage, garantissant une glacière l’hiver et un sauna l’été. Quelques ilôts de verdure subsistent aux abords, pour le maintien de la biodiversité justifiant la pousse d’herbes folles içi et là entre deux plaques de bitume du parking normalement réservé aux visiteurs mais surtout préemptés par des automobilistes réfractaires au versement d’une quelconque contribution au budget de la commune. Rationalité et économies obligent, ce Trésor, cher au coeur des français, a été délocalisé dans une commune voisine distante d’une trentaine de kilomètres. Pas facile d’accès si on n’a pas de véhicule personnel pour s’y rendre. Pas très gênant en soi, si c’est pour acheter un timbre fiscal ou un timbre amende, il y a plusieurs buralistes à proximité, plus conviviaux et chaleureux que les banquettes en simili-cuir de la salle d’attente de cette maison du service public. A l’entrée, un panneau siglé République Française, rappelle aux administrés/contribuables/assurés sociaux, des principes de laicité applicables aux lieux. A gauche de l’entrée, un guichet estampillé Caisse d’Allocations Familiales. Pour y accéder, on est priés de prendre un ticket à un distributeur à disposition du public et d’aller s’asseoir dans une salle d’attente bondée, située à droite et d’attendre son tour. Pour les impôts, le ticket n’est pas nécessaire la règle étant : le premier arrivé, le premier servi à condition que ce soit durant les heures d’ouverture. Ceux qui attendent pour les impôts sont moins nombreux que ceux qui sollicitent les services de la CAF. Mon attente fût brêve. J’étais le seul à ce moment là à me préoccuper de ma situation fiscale. Une porte latérale s’ouvre sur une homme entre deux âges, barbu, bedonnant, cheveux mi-longs, vêtu d’un Tee-shirt à l’effigie du groupe de musique Nirvana…Un type sympathique de prime abord. Je le suis dans un couloir impersonnel desservant plusieurs portes de bureau fermées. Les lieux sont restés dans leur « jus ». Même pas un coup de Ripolin récent. Nous entrons dans un bureau et j’expose à cet agent de Bercy le motif de ma venue : une prise en charge fiscale suite à un séjour prolongé à l’étranger. Résident fiscal à l’etranger? oui.Aucun problème. Quelques questions d’identité, pianotement sur le clavier de l’ordinateur administratif, quelques clics pour réactiver mon espace personnel sur le site mes impôts.gouv puis remplit devant moi, le formulaire 2042 que je signe après vérifications et qu’il se chargera de transmettre. Des justificatifs? pas la peine car il a déjà tout ce qu’il faut. En vingt minutes chrono, j’étais redevenu un respectable contribuable.
Une boutique d’opérateur en téléphonie implantée comme tant d’autres dans une galerie marchande située dans une zone d’activité commerciale quelque part en France. On s’y rend en voiture, car c’est plus pratique que les transports collectifs. Cette boutique fait face à une autre boutique de téléphonie concurrente, entre magasins de vêtements, des opticiens, un chocolatier, une boulangerie « chez Paul », à quelques encablures d’un Macdo incontournable Le chaland est quelque peu clairsemé en ce mercredi après-midi, allant et venant au magasin Carrefour qui loue ces espaces commerciaux, aux commerces satellites qui en ont les moyens. Une ambiance de congés est déjà palpable dans cette galerie climatisée à l’année. Je compare les offres des différents opérateurs en présence et j’opte pour celui qui me paraît le plus intéressant. Un employé, âgé d’une vingtaine d’années, vêtu d’une chasuble aux armoiries de l’opérateur, me reçoit fort courtoisement. Je lui demande l’octroi d’un numéro de téléphone français car le numéro étranger dont je me sers, me coûte une fortune dès que je l’utilise en Europe. Nous nous mettons d’accord sur un forfait après quelques éclaircissements de l’employé. A quel nom la ligne? Au mien. Pièce d’identité, un RIB et un justificatif de domicile datant de moins de trois mois. OK pour la pièce et le RIB mais problème pour le justificatif. C’est obligatoire pour les prélèvements. Par carte ou chèque? non par prélèvement car c’est plus simple pour le client. Ca sécurise les paiements et ça évite les oublis. En attendant d’avoir une facture à présenter, j’ai opté pour un supplément séjour en Europe auprès de mon opérateur étranger
VERSO
C’est un TER comme il en circule des centaines quotidiennement en France. Un TER de chez Alstom, à étages, à couloir unique, sans séparation entre les voitures. C’est le train du quotidien, un train d’abonnés, qui ont le choix entre le train omnibus ou le semi-direct, financé par les Régions mais exploité par la SNCF qui dicte ses conditions. Paris commande, la province s’exécute…comme d’habitude. L’ère est à la dématérialisation et aux économies. C’est un choix assumé de la part de ce transporteur et malheur à ceux qui ne s’adaptent pas à ces nouvelles conditions. La plupart des habitués de ces TER ont intégré ces nouvelles normes. Achat de billets et reservation par le biais d’une application SNCF. Très utile quand la gare est fermée. Dorénavant il faudra en passer par des billets électroniques. Si pour beaucoup ça ne pose aucun problème, pour d’autres il est nécessaire d’investir dans un téléphone portable récent, pas toujours bon marché. Et même avec un appareil haut de gamme, du dernier cri, on n’est pas à l’abri d’une contravention salée. C’est une équipe « volante » de contrôleurs, montant et descendant à bord des TER au gré des horaires et des gares. Ces équipes marchent en binôme, leur lecteur de billet électronique à la ceinture, qu’ils dégainent sans crier gare dès le premier voyageur. Peu importe s’il y a déjà un contrôleur accompagnant le train. Ces équipes volantes n’ont aucun état d’âme. Elles sont autonomes. Elles ne rendent des comptes qu’à leur direction. L’un des deux, la quarantaine replête, le teint couperosé, casquette de la compagnie posée de guingois sur un front dégarni, le second, la trentaine, carrure fine et portant des lunettes, sont entrés de concert par les portes arrières et avant du TER qui venait de redémarrer. Ils commencent immédiatement le contrôle. Ils ont un quart d’heure avant le prochain arrêt pour contrôler la totalité du train. Le train est plein mais pas bondé. A cette voyageuse transportant son chat en cage sur ses genoux « vous avez un billet pour le transport de votre animal? Plaidant la bonne foi « non je ne le savais pas je suis désolée, je pensais que l’on ne payait rien quand on voyage avec un animal de moins de 8 kilos sur les genoux, je vais vous payer le billet » « Ca fera 35 euros. Vous payez comment? A cet autre voyageur, dernier modèle d’IPhone en main, prié de présenter son billet dématérialisé et qui se trouve lui aussi dans l’impossibilité de le faire car il n’a plus de réseau alors que 5 minutes avant il regardait une vidéo sur youtube. Embarras du voyageur « désolé je n’ai plus de réseau » »vous en aviez quand on est montés à bord » »oui mais là je n’en ai plus » « vous avez fait une capture d’écran de votre billet? »non je n’y ai pas pensé et que je pouvais pas prévoir qu’internet ne marcherait plus en arrivant à Paris » »vous êtes monté où? » A Maubeuge » »ca fera 150 euros. Vous payez comment? » Vous ne pouvez pas repasser dans quelques minutes quand on aura pu se reconnecter au réseau? »Non avez vous une pièce d’identité? » »pour quoi faire? »Pour la régularisation de votre billet » » »Non je n’ai pas mes papiers sur moi » Se tournant vers son collègue « appelle la Suge » puis vers le passager « vous allez descendre avec nous à la prochaine gare…la police est prévenue »
Happée par le titre « simplification administrative » on en rêve
encore 400 000 textes réglementaires et 77 codes…on est sur la bonne voie. Merci pour le commentaire
Beaucoup aimé vos textes, merci, à bientôt.
merci pour le commentaire