voix

# 8

p. 151
mercredi 27 septembre 1995
Elle vit dans les escaliers du métro, entourée de sacs, dans une mare d’urine. Elle va pieds nus dans la rue. Elle entre maintenant dans la charcuterie où tu voulais entrer.

p. 133
lundi 27 septembre 2004
Beaubourg, Aurélie Nemours. Au commencement, le point.
Directions virtuelles : verticale, horizontale, diagonale.
Point : relais suprême. Ascension de la droite ou axe sur l’étendue.
Rythme le millimètre.
Mystique de la croix, coeur du monde formel.
Le silence peint : Carré noir sur fond blanc (1959).

nuit battante les moineaux rassemblent discours de mer cerveau écrasé par le rêve d’un autre jouissance avec les débris du nid je me hérisse de poils pour sam ai fait petit autel avec livre et carnet où tu notes disposé photo-couverture écrivains de toujours visage profil une fumée monte vanité se fond au vide ciel bas verse un jour gris ciel noir dans le gris

papy-pape grand pair offre confiture à mère – amertume des langes l’ange de voler bas – rivé à matrice profil bas – amour sans maille – sur la table mère accouche de celle qui mourut – fruit tombé de l’arbre – les oiseaux picorent

p. 128
mercredi 27 septembre 2006
Elle se souvient comment ça l’avait reprise, sensation d’être rien, valoir rien. Il était parti sur un coup de tête. La conversation s’enlisait, on n’y comprenait plus rien. Lui, elle l’avait adopté comme son ours. Il était parti sur un coup de tête. Et cette sensation de rien valoir. Balance le rien. Imaginer.

je m’appelle joanna j’ai 16 ans – mon père m’a violée sous le regard de maman – j’ai des vertiges depuis je transpire
j’ai 16 ans et demi je m’appelle joanna – je suis sûre d’être d’eux – l’un et l’autre vont ensemble – il voudrait m’épouser j’ai répondu non – que dirait papa la tête qu’il ferait – comme lui enfoncer un couteau dans le dos – ou lui cisailler les oreilles – ne pas m’en prendre à mon géniteur
maman vierge c’était bien vu – quand papa l’a eue – tout a changé papa m’instruit – les orties me piquent – j’ignorais que les orties piquâssent – leurs démangeaisons me poussent vers maman – elle me frictionne je n’ai plus mal – souvent elle me passe un savon – la vulve a l’honneur de ses attentions – quand ça démange
j’ai perdu la vue à 17 ans – ils parlèrent de vengeance – depuis je sens comme un animal – je ressens beaucoup – la taille du sexe varie d’un mâle à l’autre – certains vantent les dimensions de leur zob – dans ma tête ça passe pas tout bloqué par des cordes – ça noue le ventre tout bloqué dans forêt vierge – no maya di ka di va di jalla – o ka ko namo zavagoulaki – gipatak allo nomado – noma kola davadja noma yado – é noka lova di kapa di gouna kapala galo – on me rémunère selon mes services – je raccompagne le client si pris de panique – la peur remonte à la nuit des temps
je m’appelle Joanna j’ai 18 ans – il y a retraite à la maison-mère – je veux parfaire mon expérience avec le père – il m’accorde des entretiens – j’écoute il argumente – certains ont la vocation – je me réserve une poire pour la soif – il en est qui ne mûrissent qu’en décembre – d’autres deviennent blettes – vous avez le cafard il y a suchard
je m’appelle Joanna j’ai 19 ans – papa décline – on risque de l’inhumer aux premiers froids – si j’épousais le grec papa n’en saurait rien – je peux hâter sa fin – glissant dans son potage un poison – au point où en est le vieux – maman pas du genre de lever un lièvre – gardera le silence
je m’appelle Joanna j’ai 19 ans et demi – j’ai hâté le processus sans remords – maman m’a reproché de ressembler à mon géniteur – elle finirait par s’en accommoder – nous vécûmes paisiblement – elle épluchait les légumes je faisais les confitures – nul mâle dans la maison pour rompre l’harmonie

p. 97
Mardi 27 septembre 2011
19h30 Double Change 117 rue Lafayette
La vie parisienne a repris. Dans mon lit cette nuit, les corps s’emboîtent, forment un autre corps – sensations mère-enfant. La pensée disparaît. Tat tvam asi. Amen. Corps-à-corps panse blessure que l’autre inflige, partant vers une autre – vous métamorphose en poupée cabossée.
P content de sa lamborghini miniature de la polizia milanese.
L’Elizir d’amore alla Scala. Une aventure qui devenait la vôtre.

p. 93
jeudi 27 septembre 2012
M, hier au marché. Son regard. Avez échangé des bribes de vie – une entrée en matière.
Crevettes royales de Madagascar avec un verre de bordeaux blanc dans les graves.
Au Louvre, vous reconnaissez une silhouette de vieille fille, lunettes et jupe longue, absorbée dans la contemplation. Elle est en compagnie d’un chauve. Son fils nourrissait envers vous des envies et vous l’a fait savoir. La mère ne l’a pas cru.
Chez Nicolas, le vendeur vous a fait compliment de votre tenue : jupe Kenzo, courte et à fleurs, sur collants rouille. Le bordeaux rouge conseillé, vous l’avez ouvert aussitôt pour le gardien. Requinquer l’animal.

p. 87
vendredi 27 septembre 2013
Sacha, 9h.
Mr Arthod, 10h.
19h-21h30 La nuit des origines (UNESCO 125 av. de Suffren, salle I)

p. 76
dimanche 27 septembre 2015
Te coucher, après marche jusqu’à Vaugirard et retour par la ligne 12. Des hellébores chez la fleuriste. Comme celles que M va déposer sur la tombe d’Annah, avant de les planter dans son jardin. Monte une douleur puissante comme une mer. Ne pouvoir lutter. Les larmes ont redressé la barre. Onglet saignant puis piscine. Quelques longueurs et retour à pied. Chez Nature-Santé, dérobé une mangue et des noix. Avec ton chapeau de pluie sur cheveux mouillés et tes lunettes-papillon, le vendeur t’a regardée comme dans un film. Jeune & vigoureux, ne s’est douté de rien.
Pensé à la mort de la grand-mère que le narrateur réalise bien plus tard en laçant ses souliers. Repris Contre Sainte-Beuve, découvert en 1970. Dans ta mansarde, il fait froid. Ta veste en fourrure, râpée au col et aux manches. Garçon manqué, cheveux courts.

p. 69
mardi 27 septembre 2016
Maryse dit, la chèvre broute où elle est attachée.
Rimbaud, « Génie » – nouveau christ dans la bascule du temps.
Alep sous les bombes – le jeu des grandes puissances.
Montélimar → Nyons (en car), la semaine prochaine.
Planté deux cyclamens qui tiendront l’hiver. Peint les huisseries de l’entrée après pose par le serrurier d’une porte blindée. Dimanche dernier, repeint l’intervalle entre les doubles fenêtres dans les trois pièces donnant sur le cimetière. Le lendemain, méditation chez Joseph. Commence par petites respirations nez /bouche, bras levés en arc-de-cercle. Puis, en prononçant ôm mané taka ôm, poignets unis, paumes vers le ciel, ouverture des bras. Puis mains reposeront sur le ventre. Nettoyage du cerveau, sensation de légèreté. Jambes en tailleur, suivre la respiration. Larmes & bâillements – histoires évacuées.

p. 62-3
mercredi 27 septembre 2017
dans la tête ça passe pas – fais caca peut pas petite fille – tout bloqué dans le ventre des cordes ça serre – passe à autre chose petite chose ronde & blonde – plupart du temps c’est non elle a dit non – j’enfile une chemise garçon manqué place de choix – entre ici ailleurs petite morte marche sur des œufs – pas faire un plat – bonhomme nu debout se fond à charmeuse de serpent dans forêt vierge – no maya di ka di va di jalla – o ka ko namo zavagoulaki – gipatak allo nomado – parlure adéquate à une peau qui mue – noma kola davadja – noma yado é noka lova – di kapa di gouna – kapala galo – elle court pieds nus le sable pique la plante – se jette à l’eau son cœur plus vite bat – une lame a fendu la queue de sirène – noma kola davadja noma yado é noka lova di kapa di gouna

A propos de Marie Sagaie-Douve

Voir Le Chasseur abstrait