le fait que je n’y arriverai jamais même s’ils me disent : bien sûr que tu vas y arriver on y croit
le fait que ce « on » glissé dans la conversation est fourbe qu’il est impossible de lui faire confiance puisque je ne sais pas qui parle derrière ce « on »
le fait que ce « on » étymologiquement est singulier alors que le plus souvent il est pluriel voire féminin même si le participe passé du verbe dont il est le sujet s’accorde au masculin singulier
le fait donc que ce « on » puisse croire en moi est insupportable puisqu’il n’est qu’une entité floue perturbante qui ne porte la parole de personne en particulier quand il s’adresse à moi pour me dire : on y croit d’autant qu’il ne s’agit pas de croyance mais bien d’une réalité mienne d’une perte de capacité d’une inquiétude justifiée et je suis seule absolument seule face à ce « on » qui prétend que je vais réussir et pour me rassurer – le fait est que ça ne me rassure pas du tout – il ajoute : c’est toujours pareil tu doutes et au final tu y arrives d’ailleurs il n’y a qu’à voir ce que tu as accompli par le passé
le fait que ces derniers mots finissent de me démolir parce que je sais que le passé ne pèse rien au regard du présent et je ne parle même pas du futur parce que le présent c’est déjà du passé et que le passé n’a pas plus d’existence que ces choses anciennes conservées précieusement toute une vie qui finissent broyées à la déchèterie puisque personne n’en veut – le fait est que nous sommes toutes et tous suffisamment encombrés – alors à quoi bon
le fait que s’il me reste une certitude c’est bien celle là : rien n’est rapide ni lent ici tout est à l’arrêt depuis que les mots sont usés la langue sèche mes doigts ne retiennent plus rien et dans mon cerveau vide il ne reste plus qu’une unique phrase qui tourne en rond et dit : c’est décourageant le sable rien n’y pousse tout s’y efface
c’est interessant cet histoire de temps, de passé, de poids, de présent, d’effacement, d’enfoncement, de découragement, de sable, rien n’est rapide ni lent dans un sablier.
comme j’aime ce texte… pourquoi? pour les grains de sable et la poussière dans les mots crus et vrais , pour le ton , pour le son , pour ce qui est entre les lignes, en marge et qui s’entend. Merci!