Je joue. Très doucement. J’essaie de ne pas faire de bruit. Je joue des notes graves, chaleureuses, puis un début de gamme chromatique en essayant de ne pas accélérer le tempo. Surtout pas de crescendo. Je joue en cachette mais les sons traversent les murs. Il faut que je joue. J’essaie une anche plus adaptée à la nuit. Je joue une mélodie que j’invente sur le moment.
Les doigts de la clarinettiste
Doigts délicats, doigts de velours,
S’amusent tant au jeu d’artiste
Que les voilà doigts de l’amour
Est-ce cela qu’on appelle un nocturne ? Je cherche un balancement mais attention à ne pas trop bouger l’instrument et à rester détendue. Ce serait une sicilienne, cette mélodie Je la rejoue puis j’écris ce que je crois avoir joué sur du papier à musique. J’essaie : ça marche. J’écris le titre : Sicilienne nocturne. Puis je la joue, sans m’arrêter, jusqu’au matin.