boost #04 | tenir tête à envers et contre tout

Tenir tête à l’extrême-amont et son origine intouchable — Tenir tête à l’extrême-aval et sa fin improbable — Entre les deux : tenir tête — Quoiqu’il en coûte en dépit de envers et contre tout —    Tenir tête aux jours sans  — Tenir tête aux jours mangroves  —  envasés — juste les racines pour respirer — Tenir tête à la haute mer — aux lames de fond qui font boire le bouillon — Tenir tête aux grands vents —  Tenir tête à l’inacceptable —  Tenir tête à l’absurdité d’un système machine à broyer qui finira par t’écraser si tu n’y prends garde si tu consens si tu fermes les yeux —  si tu ne t’enfuis pas un jour — Tenir tête aux chiffres nombres résultats objectifs attendus atteints dépassés —  Tenir tête à la logique comptable —  Tenir tête à celles à ceux qui font mine de ne pas comprendre —  Tenir tête à force de lire à force d’écrire à force de marcher à force d’aimer à force de rêver à force de beauté à renfort d’imagination à toutes celles à tous ceux qui s’acharnent à vider le monde de toute humanité —  Tenir tête dents serrées — Tenir tête poings levés — Tenir tête crier s’égosiller s’époumoner —  Tenir tête à la folie —  Tenir tête à la dérade des esprits —  Tenir tête aux doutes aux regrets aux remords fallait pas j’aurais dû si j’avais su et puis c’est trop tard de toute façon — Tenir tête à la sale petite musique qui empêche de penser — de rêver — de créer — Tenir tête aux mots éructés — aux ricochets de violence rebonds débords à fleur de peau à fleur de mots — Tenir tête aux mensonges —  Tenir tête aux petites et grandes catastrophes — Tenir tête à l’oubli  — Tenir tête à toi qui m’annules — Tenir tête ce matin à la tentation de ne pas se lever – à l’idée de se dire qu’un jour, se lever, on n’y arrivera pas, on ne pourra plus ouvrir la porte affronter la viscosité du réel — prendre une grande goulée d’air marin et de soleil ces jours-là — ou bien se gorger de beauté — Tenir tête à l’ombre qui gagne — Tenir tête aux silences non-dits aux mots tus jamais éclos ravalés qui croupissent au fond des ventres font des toiles d’araignée derrière le front —  Tenir tête à l’usure  —  Tenir tête à la tentation de tout plaquer —  Tenir tête au temps qui passe
 
 

A propos de Émilie Marot

J'enseigne le français en lycée où j'essaie envers et contre tout de trouver du sens à mon métier. Heureusement, la littérature est là, indéfectible et plus que jamais nécessaire. J'anime des ateliers d'écriture au lycée et maintenant un peu ailleurs. C'est l'horizon mais beaucoup de chemin encore !

4 commentaires à propos de “boost #04 | tenir tête à envers et contre tout”

  1. Merci Emilie pour ton texte qui nous rappelle tout ce à quoi nous devons tenir tête et être debout. J’aime également ton à propos d’Emilie que je lis juste au-dessus du commentaire et bravo pour ton atelier d’écriture avec tes élèves volontaires, c’est vraiment chouette. Bonne journée.

    • Merci Clarence pour ta lecture ! Oui, cette proposition et ton retour m’évoquent le recueil d’Albane Gellé (« Si je suis de ce monde ») et sa série « Tenir debout ».

  2. merci Emilie, c ‘est un texte qui dit tellement et qui a une portée universelle.Tenir tête à la sale petite musique qui empêche de penser — de rêver — de créer, pour moi c ‘est se tenir tête ,là, qui est primordial…

    • Merci Carole pour ton retour. Oui, de la beauté avant toute chose pour tenir tête à la fatigue qui nous prend parfois…