Nul ne saura jamais qui décida de faire un feu, un grand feu, un feu de possible joie. Au milieu de toutes les angoisses qui nous avaient accompagnées durant cet exode vers on ne savait pas vraiment où. Nous avions fui la ville et ses effondrements. Nous nous étions installés à l’abri dans une clairière illuminée d’une myriade d’étoiles et de nos espoirs de sortir de ce cauchemar. En silence nous apportions au milieu du cercle que nous avions formé des morceaux de bois de toutes tailles, deux d’entre nous entassaient le bois avec méthode. Le feu avait très vite pris avec de hautes flammes qui éclairaient nos visages ravagés. Plus personne ne parlait. Petit à petit, des braises étaient extraites et posées les unes derrière les autres , formant un autre cercle dans le cercle, autour du feu. C’est alors que, sans échanger le moindre regard, sans la moindre consigne de qui que ce soit, nous nous étions mis en marche, les uns derrière les autres, et nous avions tourné, tourné, tourné.
Nous marchions pieds nus
Sur le feu de nos vies passées
Les vieilles peaux, les milles maux
Se purifier les pieds ensanglantés
Danser jusqu’au petit matin
Sur des cendres devenues tendres
Puis, sous la chaleur des braises encore brulantes, lentement nous nous regroupions dans le grand cercle marqué au sol par l’herbe tassée. Une fois toutes et tous assis, un étrange phénomène nous envahit. Plus de son plus d’image. Plus de pensée, de perception, plus de sensation. Les yeux ouverts ou fermés, c’était pareil. Ce que nous voyions, ce n’est pas nous qui le voyions. Nous n’étions plus dans le monde, c’est le monde qui était en nous.
Tout cela nous l’avons raconté entre nous, après, plutôt mille fois qu’une, pour être au plus près de ce que nous avions vécu, au sortir de l’épreuve du feu, et ne jamais l’oublier. Quand il a fallu reprendre la route, notre destin, revenus sur les débris de la ville silencieusement dévastée, nous nous sommes mis à nouveau en chemin. De la reconstruction d’une vie à partir d’une nouvelle vision. Une vision sans tête.*
*https://www.youtube.com/watch?v=FfQGaKtWJk4&t=3s
Une vision nouvelle, une vision sans tête après ce cérémonial impromptu et « revenus sur les débris de la ville silencieusement dévastée ». Tout cela c’est comme lire un livre au hasard en plein milieu. On a envie de l’emporter, celui-ci. Merci aussi pour la vidéo.
… grand merci pour ce passage sur ou devant les braises… quand on lit cela » on » envie de continuer à .. écrire. Boost il a dit FB!!