Je suis allongée sur le dos. Je me suis réveillée en attrapant mon sommeil. Quelque chose existe, là. C’est fin. C’est délicat. Une lisière. Je sais que je ne peux pas bouger. Je ne sais pas si c’est le matin ou la nuit. Une voix m’appelle. C’est une voix familière. Quelque part, dans mon crâne. Une voix qui sait comment je pense. Qui souffle mon prénom. Pas mon prénom d’aujourd’hui. Celui d’avant. Une voix matière. Elle est en moi et dans le même temps si loin de moi. Une voix qui grince.
Elle est là depuis longtemps, cette voix. Dans mon oreiller, enfant, alors que ma soeur dormait dans le lit du dessus, elle était déjà là. Il faut remonter la couverture pour ne pas entendre la voix mais je ne peux pas bouger. La voix pourrait m’observer.
Je sens le poids de la voix sur la couverture, sur le lit, sur mes jambes. Si elle avait un souffle, elle me ferait moins peur. Dans mon crâne, un brouhaha de pensées affolées et la voix qui surgit. Elle appelle. Elle m’appelle. Les autres pensées se cachent, terrifiées, derrière des souvenirs que je ne maîtrise plus.
Une porte claque. Pourtant il n’y a personne. Les voix peuvent-elles faire claquer des portes? Allongée sur le dos, c’est la position des morts. C’est moi qui m’appelle. Il faut pour me faire taire que j’ouvre les yeux. Dans le miroir, ma voix sûrement me regarde. Mais je ne peux pas ouvrir les yeux. Je risquerai de me voir au bord du lit.
Je ne sais plus comment on respire. Ne réponds pas. Tu ne peux pas t’appeler si tu es là.
Cette douceur qui émane d’abord du texte -et pourtant- une inquiétude vient : mais calme. J’aime ce calme où pointe la terreur. Cette distance calme comme un flottement avec cette voix qui bruit et qui regarde. Merci .
Beaucoup, beaucoup aimé. « allongée sur le dos, c’est la position des morts, non ? » Mais tout le reste aussi.