#boost #14 | Anna et la mer qui monte

Seule, debout, les pieds nus enfoncés dans le sable encore tiède. Le corps légèrement incliné vers l’avant, comme aspiré par l’horizon. Anna ne bouge pas — ou à peine : un balancement presque imperceptible, du talon vers les orteils, au rythme de sa respiration. La mer monte. D’abord, un frémissement dans la dentelle des vagues. Puis l’eau avance, pas à pas, langoureuse et sûre. Elle lèche le sable, elle le goûte, elle le prend, elle revient, elle insiste. Anna les bras le long du corps, ni tendus ni relâchés — suspendus. Ses yeux fixent l’eau, là où la ligne grise avance. Par moments le vent soulève un pan de son vêtement, qui claque doucement puis retombe. La mer monte. Lentement. D’abord un ruissellement plus haut que le précédent. Puis une langue d’écume vient lécher ses pieds, et repart. Puis reste. Le sable fonce. L’eau gagne du terrain, silencieuse, ferme. Elle efface les empreintes. Elle dérobe les coquillages. Elle change la lumière. Elle ne recule pas. Anna regarde. Elle sent, peut-être, le froid gagner ses chevilles. Elle laisse faire. Le sel s’accroche déjà à sa peau. Son regard ne cherche rien. Il suit, il accueille. C’est un regard sans demande. Il n’attend pas la vague, il est avec elle. Tout son corps devient œil. Tout son corps devient rivage. Et le temps, ici, avance au pas de la mer.

A propos de Cécile Bouillot

Bonjour je suis comédienne. Je développe également des projets vidéos dans lesquels je filme les gens autour d'une même question. J'écris des poèmes de rue a partir de phrases récoltées dans la rue, j'aime m'amuser avec différents jeux d'écriture, j'écris régulièrement depuis deux ans. Acte 2 Scène 2. Chaine Youtube : https://www.youtube.com/user/cecilebouillot

2 commentaires à propos de “#boost #14 | Anna et la mer qui monte”

  1. Le temps indolent qui s’écoule prend matière dans le flux et le reflux de la mer. J’aime bien cette temporalité immobile. Merci Cécile.

  2. J’y suis sur la pointe des pieds . Merci pour la sensation et ce corps œil