L’Enfant-Champi s’est installé dans les roseaux avec ses amies les abeilles. A moitié caché par les herbes hautes et ses mains à hauteur de visage, il manipule des cartes à jouer disposées en éventail. Le soleil qui filtre enivre sa chevelure brune, abondante et bouclée. Le bel enfant. A son poignet, un bracelet fait de lierre le rend coquet. Il a posé son pipeau et reste concentré sur son jeu de cartes.
Le Roi de pique, d’une main tient son épée, de l’autre le fourreau dans lequel il s’apprête à la glisser. Il a perdu un œil dans une des batailles à son actif et ses pantalons bouffants cachent de nombreuses cicatrices. Ses cheveux argentés sont crantés chaque matin à l’aide d’un fer à friser. Aujourd’hui, il est d’humeur bougonne.
Le Roi de trèfle manie le bâton avec dextérité. Tout son monde le sait. Les mains croisées sur un ventre rebondi et les pieds bien plantés sur sa terre meuble et généreuse, il inspecte les travaux des champs. Une boucle d’oreille en forme de goutte pendouille le long de son cou. Il est chanceux.
Le Roi de carreau aime jouer aux échecs. Il est représenté avec la main droite posée sur un coffre et la gauche dans un pli de sa lourde houppelande. Quelques poils roux et épars se baladent sur son torse aperçu dans l’échancrure de la chemise. Sur sa poitrine, des grelots scintillent. Il respire la suffisance.
Le Roi de cœur se pavane dans les jardins du château-plume. Il porte dans l’une main un petit paon de nuit, dans l’autre une clochette d’or enrubannée de fleurs rimbaldiennes. Aucun bijou ne le pare d’artifice. Ils ont été oubliés. Il marche à petits pas, soucieux de son nouvel ami.
La Dame de pique tient d’une main un papier de couleur bleu tandis que l’autre cache ses yeux. Dans ses cheveux d’une blondeur innocente est logé un minuscule mouchoir de dentelle où se glisse un mot d’amour. Son front sage est paré d’un bijou discret. Ayant pris connaissance du message, elle est très attristée.
La Dame de carreau, mains sur les genoux et jambes écartées est assise à côté du palefrenier. Elle lui assène les butins de guerre de son vieux mari et lui jette à l’oreille, un rire glouton. Ses cheveux clairsemés sont soufflés en arrière par une fine cordelette. Son auriculaire porte une alliance. Elle est toute gentillesse.
La Dame de trèfle s’est attablée, un coude sur la table et une main soutenant la tête tandis que l’autre main soutient le livre de comptes. Combien de vaches sont allées au taureau ? Et combien de lait ont-elles fourni? Sa coiffe est volumineuse et son collier de perles est un vrai sautoir. Elle est dubitative.
La Dame de cœur cherche son Roi. Dans les jardins du château-plume, elle marche à grands pas, les mains dans les poches. Sa brune chevelure sautille en cadence et une nuée de frêles papillons la suit, la devance. Elle porte en son sein, une offrande pour celui qu’elle aime. Ils l’ont conçue ensemble. Elle est souriante et sereine.
Absolument magnifique !
Merci beaucoup Emilie
Je viens de parcourir les textes écrits à partir des trois premières propositions de Histoires. Quel bonheur ! Je me suis régalée, merci !
Merci Françoise. Ton commentaire fait plaisir.
Très chouette, un petit côté Lewis Carroll qui se dessine ?
Merci. Pour Lewis (que j’adore), je ne sais pas. Je crois que je me fourvoie. A voir. Pour l’instant, je suis à l’arrêt et en suis désolée.
on est dans le monde du merveilleux, une manière d’être en lien avec l’enfant en soi, merci