#histoire #03 | La réunion

L’homme du fond que de cheveux par plaques désertent au sommet du crâne tapote sur le clavier de son iPhone d’un air affairé, donnant l’impression qu’il jongle entre les rendez-vous, les rapports à lire, c’est ce que ça dégage à première vue quand on ne le connaît pas, mais on le connaît bien, chacun sait qu’il n’en fout pas une. Bijou : chevalière plombant son auriculaire qu’il a gonflé comme son ventre. Expression : Blasée. 

Celui à côté, oui dans le coin là, planqué derrière la plante verte, avec son écran d’ordinateur qui devient opaque quand on le regarde en oblique, un truc d’espions, ça respire la parano. Visage poupin d’adolescent, cuisses épaisses, court sur pattes et propre sur lui que c’en est irritant. Sourcils savamment épilés, feuilletant son agenda avec la méticulosité d’un dentiste comme pour vérifier que ses journées sont aussi bien repassées que ses chemises (dont il attache le dernier bouton étranglant ainsi pomme d’Adam et velléité de sourire). Bijou : néant, mais on le verrait bien avec un collier de perles, histoire de rigoler. Expression : sournoise. 

Elle, que des cheveux bouclés en cascade viennent caresser le cachemire de son pull orange. En V plongeant. Sur ses seins qu’elle a gros. Taille fine, pantalon à pince, talons claquant sur le carrelage avant de s’asseoir avec précaution, fesses en arrière. Arrière-pensées derrière sourires aristocratiquement distribués. Soupir en posant ses yeux qu’elle détourne bien vite sur un collègue emmêlé dans les câbles du rétroprojecteur. Ne fait pas un geste pour l’aider. En même temps, les autres non plus. Bijoux : ostentatoires. Expression : ennuyée. 

Pantalon noir, Doc Martens noires, doudoune noire, sac noir, visage d’ange. On devine que l’innocence chez elle est un jeu, une façon d’endormir l’ennemi. A chaque fois qu’on lui pose une question, elle répond : “c’est une excellente question”, puis plisse les yeux et soupèse chaque parole qui sort de sa bouche. Bijoux : tatouage d’aigle sur son avant-bras, mot russe sur le haut du dos. Expression : hypervigilance. 

La moustache blanche comme une meringue, montures épaisses de styliste parisien, cerveau protubérant de joueur d’échec, le tout monté sur une épaisse colonne de marbre qui lui sert de cou. Chaque coup est un pari, papi Poker pyromane qui n’a pas peur des duels à grande échelle si possible. Guerre des mondes, des étoiles, il en fait son jus, sa carrière. Bijou : chaîne en argent, alliance dont on devine la jumelle posée sur le doigt d’une épouse dévouée et souvent à la cuisine. Expression : ironique. 

Laisser un commentaire