La forêt s’enroule sur elle-même. Les arbres forment une ronde étouffante où surgit par bribes les résidus d’une lune distante. Les troncs, noueux, feignent parfois d’ouvrir un chemin mais referment toujours leur piège. Le sol s’engloutit sous les feuilles argentées.
Des ombres glissent entre les branches. Elles n’ont ni origine, ni but. Elles sont là. La forêt n’attend ni maître ni veilleur. Elle est son propre gardien. Sa propre conscience.
Les chemins, s’ils existent, mentent. Ils ne ramènent jamais, ne reviennent pas. Ce n’est pas une boucle. C’est une spirale. Et ce qui s’égare ici ne se cherche plus. Il faut le trouver en soi.
La forêt ne se dévoile pas. Parfois, un horizon apparaît sous un rai de lune. Puis il se dérobe. Oui, il se dérobe. Il semble qu’il chute. Il ne va pas derrière la forêt, ni même dans ses racines profondes. Il va en deça. En deça de la forêt. Il y a des endroits de la forêt, des lieux minces, où le souffle se mue en silence assourdissant. Il n’y a plus d’absence mais une pression. Et la forêt bascule sur elle-même.
De l’autre côté, ce n’est plus la forêt. C’est un reg stérile, un désert de pierre sous un ciel figé, trop bas, sans lumière. Des dunes mortes s’élèvent comme des os. Tout est gris, bleu de cendre. Rien ne commence. Rien ne finit. Une autre lune y trône. Elle attend.