Il y a leurs corps tièdes dans la brise.
Il y a leurs joies d’un jour.
Il y a leurs formes balancées, leurs têtes sans reproches, leurs hanches lancéolées.
Il y a leurs épopées rompues, leurs errances écrasées, tiges décharnées, avanies de leur sève.
Il y a l’effroi inconnu comme soldatesque assaut des chimies ordinaires, des poisons répétés, des défloraisons forcées.
Il y a des têtes coupées.
Il y a les eaux qui ruissellent, les boues et les terres craquelées, les gels et les brasiers devant lesquels on se recueille.
Il y a le soufre et le feu dans le vent, les étouffements répétés, les seuils carbonisés, les possibilités de mourir.
Il y a leur silence et leurs cris qu’on n’entend pas, ce qui ne dit pas sa souffrance ne souffre pas, c’est ce qu’on dit, n’est-ce pas ?
Il y a ce qu’on craint de mutisme définitif.
Il y a ce qu’on espère de jaillissement du lendemain.
Il y a des morts et des renaissances, des collines qui s’inhibent ou s’enherbent.
Il y a des apparitions au milieu des fantômes.
Il y a des flux qui ne se tarissent pas.
Il y a des timidités devant la vie, de fausses timidités.
Verso
Oui, les timidités et les effusions. Oui, ça fuse de vitalité jusque dans les brèches, les friches, les grandes chaleurs, les trous noirs de charbon, les trous d’eaux insalubres. Oui, du rien naît et renaît. Oui, restaurée des immondices, des déchets. Oui, redressées les hautes herbes grenues et les petites feuilles trop tôt jaunies. Oui, le jaune revient au vert et les touffes sèches reverdiront. Oui les saisons existeraient encore, même s’il n’en restait que deux, celle de la vie, celle de la mort. Oui les pluies contiennent encore de l’eau, le vent de l’oxygène, le sol sa minéralité, ses forces telluriques. Oui mais non, si les glaciers fondent et disparaissent, si les nappes phréatiques tremblent et se vident. Oui mais non si la terre se creuse pétrolifère, toujours plus profond, si les entrailles brûlent, si le centre se révolte, si le ventre se scinde et se fragmente, les plaques tectoniques, la Terre liquide, magnétique soumise à extraction, excavée, fouillée, ses failles mises à nu. Oui mais non.
avec toi il y a les corps et les joies et les herbes qui balancent
avec toi il y a les oui qui deviennent peu à peu des « oui mais », tellement juste à faire froid dans le dos si on lit bien chaque mot…
« oui mais non… si les entrailles brûlent »
merci Perle
oui oui, mais non non, ça ne va pas du tout, dis comme ça, c’est clair