#rectoverso #04 | Turin
Boulot à Turin, l’amour en bas, à la maison. École primaire, concierge. Turin n’est pas une métaphore. De longues rues droites, le FIAT, des yeux jaunes, pas de collier visible, mais je suis sûr que Turin n’est pas une métaphore. Du papier mâché accroché près des Alpes, mais ce n’est pas une métaphore, Turin. Toutes les salles de classe à ma disposition, à nettoyer en un temps record pendant la récréation du matin : dans chaque salle, je commence d’un côté et je termine de l’autre, comme des enfants qui coupent la nourriture à la fourchette. Je travaille pendant qu’ils mangent. L’eau de ma serpillière goutte comme du jaune d’œuf. Les murs de la classe semblent posés sur les bancs d’école, regardant droit devant eux, sans même se toucher les cheveux ni le nez un seul instant. Je ne sais pas quoi ajouter à cet espace ; je ne suis pas un chef qui sait ajouter, mélanger ou faire sauter pour donner du goût. Je ne peux rien laisser hors de place ; tout doit rester immobile, comme une toile d’araignée (ou bien, comme dans une toile d’araignée). Il y a un vent dans lequel on peut nager, une mer qui souffle. Turin veut peut-être que je me sente chez moi, mais un vent comme celui-ci ressemble plus à des trucs qu’on me jette dessus. La nuit, dans ma chambre chez ma tante, il se transforme en drap qui bouge pendant mon sommeil.
Merci, j’aime beaucoup. Par exemple: « Turin veut peut-être que je me sente chez moi, mais un vent comme celui-ci ressemble plus à des trucs qu’on me jette dessus. »
Merci pour votre texte. Saisie par « un vent comme celui-ci ressemble plus à des trucs qu’on me jette dessus », je suis vite remontée au début « l’amour en bas, à la maison. ».
soufflée par tant de choses en peu de mots ! Ce « Turin n’est pas une métaphore » qui se répète nous fait avancer, collés aux basques du narrateur, à hauteur des mots qui disent sont monde : la serpillère qui goutte comme du jaune d’oeuf, les murs posés sur les bancs, …et oui comme Simone le relevait, cette phrase sur le vent est incroyable!