#rectoverso #04 / Le jupon rouge

Je ne sais pas écrire les jupes qui tournent. C’est pourtant mon premier souvenir. Elle fait le voeu d’un jupon de feu et il y a des gitans autour du feu, puis viendra l’heure de faire d’autres voeux, de faire le voeu de ne pas mourir. Je n’ai pas été soulagée qu’elle prie le ciel de ne pas mourir. J’aurai souhaité qu’elle rêve encore de son jupon, car les jupons qui tournent sont la vie.

La jupe en velours rouge qui tourne et s’envole et ondule comme le café quand on remue sa cuillère. Parfois je la soulève de mes deux mains, bien haut, au dessus de ma culotte, pour mettre le nez dedans et pouvoir moi aussi, tourner comme le velours. Maman me met une tape derrière la tête alors que c’est elle qui a cousu la jupe.

J’ai toujours tourné comme les derviches. J’ai toujours su comment le faire. Le pied est ancré dans la terre et la tête s’adresse au ciel. Il faut juste pour cela, savoir que dieu est une femme.

Alors tous mes romans terminent par cette femme qui se sauve par la fenêtre, d’une robe blanche trop ajusté qui empêche les hanches de vivre et qui risquerait de se teinter en rouge, et qui part tourner avec les ombres des gitans. Et comme je ne sais pas écrire les jupes qui tournent, mes romans ne finissent pas.

A propos de Léa Yasmine Djenadi

Psychologue. Métisse. J'aime aussi lire dans des langues que je ne parle pas. En création d'une newsletter... (comme tout le monde, non ?)