#rectoverso #11 | Chemins tournants

Recto | Choses qui ne tiennent qu’à un fil

Ecrire

Les nuages cotonneux

Les phrases filandreuses sur du papier jauni

Les pluies d’étoiles filantes quand l’orage gronde à la nuit tombée

Les hululements d’un train arpentant la vallée parmi les meuglements des vaches

La face cachée de la lune depuis qu’on colonise l’espace en expédiant dans le ciel des nuées d’artifices

Les châteaux de sable bâtis par des enfants sur les plages et que des adultes imbéciles piétinent sans vergogne en rigolant

Le chapeau sur la tête de l’homme obstiné qui, pour suivre sa pente, lutte, le corps arcbouté, contre des vents contraires soufflant en rafales affolées

Le sort de la bataille engagée au petit matin quand il dépend de l’arrivée d’un général et de ses troupes empêtrés dans des marécages et des terres hostiles retardant leur avancée funeste vers l’ennemi galvanisé

La vérité quand elle vacille, isolée sur un éperon rocheux frappé par les ressacs d’un océan de mensonges, de tromperies et d’artifices, tentant de prendre pied tant bien que mal sur une arête glissante pour se retrouver en équilibre précaire, prête à choir et disparaître, engloutie, sous les yeux hagards de fossoyeurs égarés

Le temps perdu, le temps passé à ne rien faire, pas même tourner les pages d’un livre ni contempler dans le ciel les myriades, le temps pour rien, tournant sur lui-même, sans fin, simplement le temps, immobile, indifférent, lointain

Traverser la rivière sur la barque du vieux nocher, toucher l’autre rive où l’on rêve, quand de barque et de nocher, il n’y a plus, ni de rêveuse au bord de l’eau qui dort

Le léopard de l’amour, le saola, le kakapos, le vaquita, le paresseux nain, toutes espèces menacées parmi tant d’autres

Les pétales de roses

La jeunesse

Aimer

Verso | Tout lieu est une histoire

notes en vue d’un livre (peut-être)

Le chemin montant.
La vigne abandonnée.
L’herbe aux lapins.
La pinède aux palombes.
Chanteperdrix.
Le soleil couchant sur les plaines.
Le pont-canal.
Le chemin de halage.
Platanes au bord de l’eau.
L’éclusier de Madame.
Le chemin tournant.
La meunerie au bord du fleuve.
La grille du château.
Le jardin suspendu.
Le clocher forteresse.
Sous le porche, Christ débonnaire.
La rue des glycines.
Le café de la place.
A la belle Hortense.
Le boucher de l’élite.
Coiffure pour dames.
Journaux, clopes et pacotilles.
Les bains-douches.
Le boulodrome.
Le terrain de rugby.
La rigole de l’étang.
Le bassin-lavoir (souvenir des lavandières)
Le pont de La Serre.
Le pont suspendu.
La barque et l’embouchure.
Sur la rive du fleuve (la partie de pêche).
Vendanges à la cave.
La rue des jardins.
Le cimetière vieux.
La maison des morts.
La maison hantée.
La maison de famille.
Le jardin de derrière.

Codicille
Toute photographie est une histoire.

A propos de Serge Bonnery

Autodidacte, passionné de littérature en général et de poésie en particulier. J’ai publié trois récits (éditions de l’Amourier et éditions Le Temps qu’il Fait) ainsi que des textes dans des ouvrages collectifs et des revues. Je réalise parfois des livres d’artistes dans la compagnie de peintres et de photographes. Je pratique pour l’essentiel l’écriture de fragments. Ma participation aux ateliers de François Bon revêt un double enjeu : développer et améliorer mon écriture du fragment ; faire de l’écriture une pratique quotidienne. Mon blog : https://sergebonnery.com

7 commentaires à propos de “#rectoverso #11 | Chemins tournants”

  1. J’aime votre titre : « Tout lieu est une histoire », reste à l’écrire.

    • Quelle angoisse !!! Je vais essayer, petit à petit, sur la pointe du bic ! mille mercis pour vos encouragements.

  2. Quel texte magnifique , inspirant et poétique , vraiment entre écrire et aimer tout un monde … bravo !

    • Merci Carole, votre lecture me touche. J’ai du retard dans mes lectures de vos propres textes. Je reviens vite vers vous, promis.

  3. Je relis cette traversée du temps et de l’eau (mais c’est la même chose, non? ces marécages, cette rivière et son nocher) et j’aime beaucoup.

  4. temps et eau, cela ferait un très beau titre, à la manière de Holderlin. Merci à vous.

  5. nombreuses sensations réunies là
    et tant de jardins, de rivières, de maisons que je ne peux que m’y plaire…
    merci Serge