Parce que les plus important·es c’est quand même celles et ceux qui ont changé ma vision du monde, permis de sortir du chemin tout tracé de l’enfance. Plus que les aimé·es, les admiré·es ? Ce n’est pas incompatible.
1975-1979 Pas encore né
Je commence juste à être capable de percevoir que l’autre est acceptable, qu’il est un être désirant, que la pulsion que je ressens à sa vue s’appelle désir et qu’un jour je pourrai la nommer en la regardant en face, hors des évidences héritées de l’enfance.
De l’autre côté de la Méditerranée, Fernand Pouillon, l’architecture, la création de mondes à partir d’un territoire. Renifler, intuiter le territoire pour y construire un monde à soi, désirable par tous.
Le journal de Claude Roy (Moi je, Nous, Somme toute, …), Edgar Morin (le paradigme perdu, la nature humaine) Kenneth White (Dérives). Brigitte Fontaine aussi mais elle, elle me suit depuis un moment et pour longtemps encore.
Lou Reed, Laurie Anderson. Oh Superman. Désert de JMG Le Clezio. L’architecture d’un homme de Ricardo Bofill. Les pierres sauvages, walk on the wild side.
1979-1981 De l’architecture, des jardins
Ah ! Enfin né. Ça a mis 28 ans et ça fait du bien de se sentir vivant. Plus qu’un désir de création d’espace bâti et paysage, crayon et pioche à la main. Les bâtiments de Bofill, Fabrice V. qui dessine, écriture en images. Jean Labertonnière part dans des mondes si étranges. J’aime tant ce nouveau monde, la grande ville, ces mots jamais entendus, jamais écoutés. Jean Pierre Le Dantec édite Kenneth White, Jean Paul Dollé parle de Sartre, Philippe Sers tourneboule les méninges, le rare cours de Roland Castro est un émouvant poème. Je défonce à la pioche des sols gelés du côté d’Igny, je dessine pour me rappeler de tout ça, épuisé.
1981-2008 De la photographie
De l’instant décisif de Henri Cartier Bresson aux instants pas du tout décisifs de William Klein et de Bernard Plossu : le temps ne s’arrête pas, jamais immobile, l’instant n’existe pas, la vie c’est flou ! L’image, imaginaire compagnon quotidien d’une vie professionnelle en milieux potentiellement hostiles, sinon indifférents, un ministère puis du commerce. La photographie documentaire, stockée, conservée, classée, archivée, vidéodisquée puis marchandise achetée, négociée, encadrée, exposée, vendue ou pas. Des milieux, des façons de gagner sa vie, de vivre, à l’aube dans une brocante de banlieue, à midi à Drouot, l’après midi dans un atelier d’artiste, le soir un cocktail chez Christie’s, la semaine prochaine à New York ou Rotterdam. Vu de loin, la routine peu propice à imaginer des histoires semble absente — perspective fort trompeuse.
Le Jardin Planétaire de Gilles Clément à la Villette, les photographies sans personnages de la mission DATAR. Y et D qui un jour parlent du marché de la photographie aux USA. Walker Evans, Josef Koudelka, Idrissa Ouédraogo à la Comédie Française, des trajets incroyables, les livres de FB, le retour de Jean Pierre Deffontaines.
2008-2016 Retours
Ça devient plus compliqué : une crise économique, internet démocratise le savoir. Retour vers le paysage et Gilles Clément, deux colloques à Cerisy rapprochent l’agronomie, les jardins, l’image, la littérature. Je fais des PLU avec Fabrice V., furtive tentative de raconter et imaginer des territoires.
Pierre Scoarnec, domestique de Pierre Loti, arrière-grand-père oublié, repointe le nez. Servir la littérature, ça dit quoi ? Comment ça m’imprègne, comment tu fictionnes le monde ? Ça pourrait être quoi la fiction domestique ? Je dépose à la médiathèque de Rochefort une centaine de lettres de Pierre Loti, ça déclenche une exposition à Paimpol, un article, un atelier d’écriture, le retour à FB, la renaissance de Pierre Scoarnec, un projet de livre. Claudia L. a été importante.
VERSO
Philippe Sers est un philosophe de l’art et homme de lettres français. Il est philosophe, essayiste et critique d’art, docteur d’État, Grand Prix national pour son activité d’éditeur. Professeur au Collège des Bernardins, il a enseigné à l’École nationale supérieure des beaux-arts, à l’unité pédagogique 7 (Grand Palais), à l’École d’architecture de Paris-La Villette.
Hier soir, à la Chartreuse de Villeneuve-les-Avignon, Kenneth White, poète écossais installé en France est intervenu en lieu et place de Edgar Morin, retenu en Colombie. Il a lu des textes de Dérives (Lettres Nouvelles 1978).
En 1969, Claude Roy publie le premier tome de son autobiographie, intitulé Moi je, chez Gallimard, Sur le plan politique, il se positionne contre tous les régimes oppressifs, dénonçant notamment la répression en Turquie. Cependant, son intérêt principal se porte sur la situation des pays de l’Est.
Une utopie brisée, regards sur la cité « Climat de France » Construite en 1957 à Alger, Climat de France est une cité monumentale réalisée par l’architecte Fernand Pouillon. Conçue pour pacifier une Algérie en plein conflit avec la France, la cité est devenue un ghetto surpeuplé. Le photographe Stéphane Couturier a posé son regard sur ce lieu chargé d’histoire. Des clichés et des vidéos à découvrir jusqu’au 28 septembre à l’Hôtel des Arts, à Toulon.
Aujourd’hui, on pénètre à Abraxas, à Noisy-le-Grand, sur la pointe des pieds, cherchant l’entrée à tâtons pour finalement se retrouver propulsé hors du temps face à cet ovni. Ricard Bofill a créé une structure rétro-futuriste impressionnante, voire écrasante. Si elle a manqué plusieurs fois d’être détruite, elle a toujours trouvé des défenseurs, prêts à tout pour sauver sa cause ; c’est qu’entre ce dédale d’escaliers et ses structures intrigantes, les espaces d’Abraxas laissent entrevoir le rêve loufoque d’un architecte de génie.
Longtemps exilé aux Etats-Unis, Bernard Plossu est un photographe nomade qui se situe dans la lignée d’un Robert Frank. Il appartient à cette génération qui se situe délibérément en marge du « métier » de reporter-photographe pour ne se consacrer qu’à une photographie vécue comme expérience individuelle et intime. Il se sert du réel comme d’un écran sur lequel il projette ses émotions.
Entre Ramuntcho et Sortie d’usine il y a un monde, mais en y pensant, je me dis que Loti, son ouverture sur le monde, sa bizarrerie m’ont peut-être donné la curiosité de Louis Ferdinand Céline, Bernard Marie Koltés, Brigitte Fontaine, Edgar Poe, FB, … Allez savoir.
Un itinéraire dans le siècle (demi-siècle). Merci surtout pour Abraxas, architecture fascinante. je me rapelle d’y être allé diner un soir chez un copain qui venait d’acheter.
Merci Danièle. Je suis revenu il y a peu à Abraxas. J’adore.