A propos de Lamya Ygarmaten

de prof à rédac chef, j'aime bien lirécrire.

#histoire #10 | L’immensité et les verrous

Voilà comme elles sont : mère et fille trainant des valises, avançant lourdement, les mains accrochées, cheminant péniblement à travers les différents portiques. Non, voilà comme elles sont réduites : arrêtées dans leur parcours, sommées de reculer, mises à part. Non voilà comme l’enfant est : hurlant, pleurant, encerclée d’uniformes, de bras et de mâchoires crispées, assiégée par les frontières, les Continuer la lecture #histoire #10 | L’immensité et les verrous

#histoire #09 frontière et dignité

La petite fille hurle, elle pleure, on l’entend depuis la zone des arrivées. Sa mère, surement, la retient, essaye de l’entourer de ses bras, la petite fille continue de se débattre, et de jeter sa rage aux visages des policiers aux frontières qui l’entourent. On comprend qu’ils lui refusent, à elle et sa mère, l’accès à l’avion. Elle ne pourra Continuer la lecture #histoire #09 frontière et dignité

#Histoire #08 | Alger – de ce qu’elle sonne comme douleur

Je suis de retour. J’avais comme oublié l’odeur de mon pays, les terres ont chacune leur odeur, je ne parle pas de celle des corps, ni de l’haleine des passants, je parle de celle l’air, élément principal avec la terre, le ciel, et le soleil de ce décor qui me souffle au visage à ma sortie de l’avion, quand les Continuer la lecture #Histoire #08 | Alger – de ce qu’elle sonne comme douleur

#histoire #04 | pourquoi

Pourquoi à l’heure précise des vêpres, au moment où l’après-midi s’étire, et la journée s’installe comme si elle ne devait pas bientôt quitter la scène, elle s’est mise à son balcon, et a surement été une fois encore assaillie par toutes ses pensées assassines, celles qui lui répétaient d’en finir, qu’elle ne pouvait plus supporter ses jours, que ce qui Continuer la lecture #histoire #04 | pourquoi

#rectoverso #06 | Quand on est plâtrier

Quand on est plâtrier, en tous cas quand on est comme moi Salah, plâtrier, on n’a pas peur du monde. On en voit beaucoup du monde passer par l’atelier. Mes portes sont toujours ouvertes, on pourrait penser que je vends des fruits ou du pain, mais non, je fais du plâtre. Les habitués du quartier savent qu’ils peuvent me trouver Continuer la lecture #rectoverso #06 | Quand on est plâtrier

#rectoverso #02 Kerangal | Naviguer la nuit

À ce stade de la nuit, la cafetière italienne siffle et il est toujours déjà trop tard quand elle siffle, alors qu’il soulève lentement sa lèvre supérieure, du bout du doigt, et déloge la boule de tavac à chiquer, qu’il pose à côté de son assiette, sur la nappe en nylon de la table de la cuisine. Il éteint la Continuer la lecture #rectoverso #02 Kerangal | Naviguer la nuit

#rectoverso #01 | des lieux communs

Recto Ernaux Une trop grande place carrée, pour tout ce qu’elle étouffe, quatre arbres redoublent ses coins, aucune ombre, des pigeons y marchent bas. Des bancs plein soleil entourent une fontaine. Les plus vieux sont assis, dans l’attente d’un jour qui n’arrive plus, les plus jeunes courent, ignorant le monde qu’ils tentent d’attraper.  C’est comme un globe scié, un hémisphère Continuer la lecture #rectoverso #01 | des lieux communs

#été2023 #08 | Rencontre fortuite

La vieille lui dit de déposer le paquet sur la bibliothèque. La jeune fille ne sait pas d’abord à quoi elle fait référence. Elle n’a vu aucune étagère. En jetant un regard circulaire, elle s’aperçoit qu’il y a un seul meuble dans la pièce, énorme, qui s’étale sur tout le mur. La bibliothèque compte plusieurs portes, et un renfoncement carré Continuer la lecture #été2023 #08 | Rencontre fortuite

#été2023 #07bis | « Je n’ai pas assez parlé de cette odeur »

Je n’ai pas assez parlé de cette odeur, qu’elle laisse derrière elle, qui reste dans la pièce même une fois qu’elle l’a quittée. Je n’ai pas dit comme elle s’est agrippée à mes narines, y est entrée brusquement, s’y est engouffrée, comme elle a tapissé mes viscères, je la sentais glisser à l’intérieur de moi, comme la vapeur aux bains Continuer la lecture #été2023 #07bis | « Je n’ai pas assez parlé de cette odeur »

#été2023 #07 | corps

Les gestes sont furtifs, et le regard fuyant, tout en elle est ramassé, contenu, comprimé. Elle semble dans l’attente, comme le proverbe le dit, que la terre sous ses pieds s’ouvre et qu’elle puisse y plonger, elle est sur le départ, sur la lancée, elle marche comme on marcherait sur un fil, ténu, elle se retient toujours de se laisser Continuer la lecture #été2023 #07 | corps