on donne des nouvelles à mesure...
Revient souvent la question de pourquoi notre passage à version imprimée de publie.net.
Réponse élémentaire : large partie du public concerné par nos textes non équipée de liseuse ou tablette, est fausse réponse. Notre aventure est numérique, parce que telle est l’écriture, et c’est l’adéquation du média que nous voulons explorer en tant que création. Notre aventure reste d’abord numérique.
Mais il y a autres niveaux de réponse. Par exemple, que je ne supporte plus le dédain dans lequel sont tenus, par la presse littéraire notamment, les auteurs numériques, alors que c’est là que se passe désormais l’essentiel de l’invention de formes. Il y a aussi nos propres pratiques : j’ai vu des bibliothèques proposer des fantômes (et merci, Rennes ou Poitiers, de cette question sur la médiation), faux livres pour inciter à la découverte numérique de nos textes : maintenant, il y aura les deux, et il va vite falloir s’habituer au bandeau oblique de notre maquette – on vous présentera vite...
Et mot essentiel : complémentarité. L’impression à la demande, pourquoi ? 1, parce qu’elle existe, 2, parce qu’elle va devenir dans les prochains mois un rouage essentiel de la diffusion du livre. Elle n’est plus service de substitution, mais outil d’invention livre en tant que tel. Et, même chez Hachette, nous serons dans les premiers de leurs partenaires à utiliser le POD comme outil de première impression, et non pas reprise de livres existants... Fondamental pour le contemporain.
Jusqu’ici, l’impression à la demande était un service lourd, pas techniquement au niveau de l’imprimerie traditionnelle, et supposant la gestion des stocks par l’éditeur. Notre partenariat, tel qu’il se dessine avec Hachette/Lightning Source (et les remercier encore et encore de l’accueil et de l’ouverture – je précise aussi que j’ai toujours pratiqué le web à ciel ouvert, mais que rien de ce que j’énonce ici ne les engage, work in progress), s’appuie tout d’abord sur la radicalité de leur proposition :
– résultats époustouflants et souplesse de la fabrication sur ces machines incroyables, faut le voir pour le croire (souplesse : de 18 à 1200 pages, formats idem)
– commandes depuis l’ensemble des librairies diffusant Hachette, c’est-à-dire tout le monde, depuis librairie de quartier, votre libraire de ville, ou bien sûr les grandes chaînes de vente en ligne, y compris Fnac et Amazon, et y compris les grossistes par lesquels transitent les commandes bibliothèques
– une fois déposé le fichier sur le serveur Lightning Source, nous n’intervenons plus dans le processus, c’est Hachette qui gère la remise libraire et l’expédition
– les commandes sont bloquées à 21h, transmises de Nashville à Maurepas à 5h du matin, l’impression se fait dès 7h, et ça part dans les expéditions Hachette aux libraires du jour ;
Deuxième élément : le livre lui-même. Ce qu’on dépose sur le serveur ftp de Lighning Source, ce n’est pas le scan d’un livre papier existant. C’est un mini-site web, avec ses méta-données mais surtout son espace graphique. C’est noir et blanc dedans, mais photos plein bord haute résolution, toute liberté graphique autorisée. Le matin où nous avons visité le centre d’impression de Maurepas, j’avais dans l’idée de prendre dans le catalogue publie.net ne qui était le mieux compatible avec le livre traditionnel. Une heure après, nous savions que c’était un outil de création aussi riche que l’epub, qu’il nous fallait investir cet outil aussi avec nos réalisations art&portfolios, la revue D’Ici Là ou des expériences comme Meydan|la place.
Bien sûr, tout ne se fera pas d’un seul coup. Nous sommes prêts au chantier. Hachette nous demande 50 titres prêts pour entrer au catalogue. Nous investirons progressivement l’outil, pour cette première salve probablement avec les textes qui posent le moins de difficultés graphiques. Mais nous continuerons la production au rythme qu’il nous sera financièrement possible de tenir (rémunération des personnes en charge des InDesign), si tout va bien une dizaine par mois, avec objectif de 150 d’ici un an.
Reste à vendre. Ce métier, en quelques années, à considérablement changé. Un livre reste en moyenne 6 semaines en librairie. Les éditeurs principaux ont déjà basculé, même si Hachette est le seul à avoir anticipé la bascule via ce centre d’impression : un livre qui se diffuse à moins de 50 exemplaires par an n’est plus réimprimé, mais passé en POD (print on demand). Si, dans les premiers mois, publie.net va encore faire figure de cas à part, dans un an nous serons au coeur des nouveaux process de diffusion.
Le marketing du livre papier, c’est d’en mettre le plus à disposition possible pendant un temps très limité dans l’espace de circulation rapide qu’est la table de librairie. Nous ne serons pas sur les tables des libraires, nos livres ne seront accessibles que sur catalogue. Mais nous pouvons atomiser ce catalogue : il sera centralisé sur notre propre site (ce billet d’ailleurs parce que nous élaborons ces jours-ci ce site), et, surtout, à chaque auteur de mettre en valeur ses propres ressources sur son site.
Dans la proposition sur notre site, il n’y aura pas de libraire favorisé, puisque nous n’actons pas nous-mêmes la vente. A chaque auteur de proposer un libraire préférentiel. Mais, dans les conditions actuelles de diffusion, c’est au lecteur de définir son mode d’accès, selon ses usages et ses préférences – et donc, notre liberté à nous, d’informer de ces avantages et de proposer plusieurs accès directs.
Et c’est bien l’enjeu aujourd’hui, largement au-delà de publie.net, pour l’impression à la demande. Aux libraires d’inventer dans le service, confort et options. Pour nous :
– la possibilité d’offrir un livre à une personne de votre choix, en le lui faisant expédier directement (48h max pour réception) ;
– la possibilité de vous faire expédier le livre à domicile, bien sûr, ou de le retirer à votre librairie physique, sans privilégier ni l’un ni l’autre des 2 modes ;
– la possibilité pour l’auteur (contrairement aux contrats traditionnels) d’imprimer à son nom des exemplaires au prix éditeur, et de les revendre lui-même lors d’initiatives, lectures et salons (mais nous ne gèrerons que la possibilité de remise et la facturation, nous ne financerons pas de pré-stocks).
– la possibilité bien sûr de pré-commandes, avec envoi dès premier dépôt de fichiers, donc y compris possibilité de souscriptions, ou de tirages de tête validés par une page personnalisée, et nous mettons à jour ensuite le fichier ftp.
Enfin, ultime brique, retour à cette complémentarité.
Prenez une collection comme Washing Machine, dirigée par Hubert Guillaud. Version numérique : plus de 1000 liens externes dans chaque livre. Dans la version imprimée, ces ports externes seront discrètement soulignés par un astérisque*. Et surtout pas un lien http://... imprimé en note de bas de page.
Surtout, nous nous engagerons à fournir à chaque acheteur de livre papier un fichier epub gratuit et sans DRM du titre acheté, y compris pour les bibliothèques qui se seront procuré l’ouvrage. Nous demanderons aux auteurs d’en assumer le risque : le numérique comme service.
On explore plusieurs formes techniques pour que ce soit réalisable, indépendamment du libraire chez qui l’achat a été fait. Nous nous engagerons à ce que tout acheteur de la version papier ait accès gratuit, selon ce que nous mettrons en place, soit à transmission de l’epub via simple envoi mail de la preuve d’achat (ticket de caisse libraire ou facture Fnac, Amazon etc, ou votre photo avec l’ouvrage à la main), soit à version streaming de l’ouvrage via code imprimé dans le livre (la version streaming donne accès à tous enrichissements, liens, images couleurs, audio etc.).
Attention : tout cela est susceptible d’évoluer. Ce site est chantier de réflexion à voix haute et partage. Mais dans l’idée, c’est ça.
Les livres seront proposés au prix habituel des productions imprimées. La remise libraire est la même. Notre charge éditoriale (les InDesign) la même que dans l’édition traditionnelle, à ceci prêt que nous gardons notre logique commando – on pense web (n’est-ce pas, Gwen et immense merci, RL, SKL, AR et les autres prêts au chantier...). Par contre, pas de frais de distribution, donc possibilité d’une rémunération auteur symboliquement double de la rémunération traditionnelle. Nous n’avons pas encore calculé précisément : 30% risque d’être difficile, mais 23% serait un bon équilibre. En cela aussi, non pas considérer l’édition comme une maison, qui s’occupe de la boutique à votre place, mais un outil – en cela, la coopérative – à votre disposition pour diffuser et faire diffuser votre travail.
À suivre. On explore, on bosse.
Photographie ci-dessus, la seule raison à l’expérience : les textes, les auteurs... Et le sens et la fierté et la solidité qu’on tire ensemble de tout ça.
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1ère mise en ligne et dernière modification le 6 mars 2012
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