quoi faire de sa villa romaine ?

épaisseur du temps et fouilles de sauvetage


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J’avais vu ça récemment lors de la rencontre avec les urbanistes : plusieurs points indiquaient des fouilles de sauvetage, vestiges néolithiques ici, et, en plus gros, la villa romaine.

Restait à la retrouver. Le plateau de Saclay n’est pas grand, mais on le découvre à mesure dans sa complexité de routes, chemins, parcelles, qui se complexifient à mesure qu’on approche de la frontière géographie qu’est la retombée abrupte sur la vallée de Chevreuse et son hyper densité urbaine. C’est le même schéma qui va d’ailleurs servir de base aux projets en cours.

Donc j’ai marché et arpenté. J’habite en périphérie de grande ville de province avec la campagne tout auprès mais suis vissé à mon ordi, donc mes échappées vers la grande ville me permettent au moins de respirer le bon air des champs. A quoi on reconnaît, quand elle ne figure pas sur vos plans, une villa romaine indiquée par un cercle rouge sur un schéma d’urbanisme aperçu 3 semaines plus tôt ?

Elle eut sa splendeur, ses caves, silos et toits entre le 2ème et 3ème siècle de notre ère, mais une partie de ses fondations date du 1er siècle. On l’a exhumée, entre 1994 et 1998, pour tracer ce chemin d’accès qui longe Supelec. Cela veut dire que partout ailleurs, dans les champs, il y a ce vieux tissu de l’occupation humaine, en ce point protégé parce que surplombant la vallée, et à proximité de la puissante Lutèce qui devait bien avoir 6000 à 8000 habitants (je n’y connais rien, je sais qu’au temps de Rabelais c’était dans les 14 000, merci, ô visiteurs, de préciser si vous savez !) – on a en France ce dispositif dit des fouilles de sauvetage, qui ont entraîné l’éclosion d’une nouvelle discipline, l’archéologie urbaine (en opposition à ce qui serait, ici même, l’archéologie des champs ?). En général, il faut aller assez vite. Dans les régions à forte densité archéologique, Nîmes ou Marseille, c’est l’aubaine de l’ouvrier découvreur, à qui le patron du chantier remet illico une belle somme cash pour qu’on procède au bétonnage ou recouvrement immédiat parce que marre. Reste ce qu’on a su en faire un peu partout, la galère romaine exposée dans le Centre Bourse de Marseille ou même le sous-sol de la médiathèque Poitiers... C’est à condition de pouvoir les scénographier, ou de la majesté dont parfois le vestige se dote. Ce n’est pas le cas ici, où la continuité serait plutôt à établir avec les 4 fermes encore en service, et dont la forme carrée n’a pas tant varié.

Ici ça tombe bien, il y a encore de la place. Les vestiges des étudiants qui ont procédé à la fouille, ce petit pont de planche, ou cette inscription hypocauste (fourneau souterrain, me dit Littré) sont plus émouvantes, dans ces verts intenses d’une fin de printemps pluvieux, que l’alignement humble des vieilles pierres.

Je l’avais cependant retrouvée, sous l’immensité égale de la terre, ici, la villa romaine, là même où doit tout prochainement, et déjà sur les plans des urbanistes, s’étendre la nouvelle conquête de la ville.

 


responsable publication François Bon © Tiers Livre Éditeur, cf mentions légales
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1ère mise en ligne 19 mai 2012 et dernière modification le 20 mai 2012
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