Les derniers rayons du soleil couchant filtrent à travers les rideaux de lin. L’odeur persistante du dîner flotte encore dans l’air, un mélange de rôti et d’épices du dîner.
— Cette année, elle a fait fort ta mère. Elle veut toujours offrir le meilleur cadeau, dit-il en lui tendant les assiettes sales qu’elle place dans le lave-vaisselle.
Debout entre la cuisine ouverte et le séjour, il observe sa femme avec tendresse. Ses cheveux sont retenus par une pince d’écaille qui laisse échapper quelques mèches rebelles. Ses hanches fines et ses longues jambes se balancent légèrement tandis qu’elle s’active. Une pensée fugace lui traverse l’esprit.
Pourquoi n’ont-ils pas eu de deuxième enfant ?
— Elle est comme ça, elle l’adore, répond-elle sans lever les yeux vers son mari.
Faire un enfant à 55 ans ?
Le bruit sourd du lave-vaisselle ponctue ses paroles. Elle s’essuie les mains sur le torchon suspendu près de l’évier, un geste machinal quelle répète chaque soir depuis des années.
— Tu sais combien ça coûte un cadeau comme celui-ci ?
— Sois indulgent, c’est son seul petit-fils.
Sa voix porte une patience résignée, un ton qu’elle adopte souvent quand ils parlent de sa mère. Lui sent monter une irritation familière.
Il calcule mentalement. L’enfant aura vingt ans quand j’en aurais au moins 76.
— Deux mille huit cents euros. Elle a lâché presque trois mille balles pour un cadeau d’anniversaire. Elle ne tourne pas rond la grand-mère.
La femme s’arrête aussitôt. Les sourcils se soulèvent et la bouche forme un petit rond de surprise.
— Mazette, ça fait une sacrée somme. Dis donc, comment connais-tu le prix de ce télescope ?
Un silence gêné s’installe. Il détourne le regard, ses joues se colorent légèrement.
— J’ai cherché sur internet, j’avais pensé à ce genre de cadeau, avoue-t-il.
La femme dodeline de la tête avec un sourire en coin, une expression moqueuse qu’il connaît.
— Ce genre de cadeau pour lui ou pour toi ?
Il croise les bras, son agacement est palpable dans chacun de ses gestes.
S’il fait des études longues et soutient une thèse, dans quel état serais-je ? Tu parles d’un cadeau.
Le rappel de l’âge,
Est ce que je pourrais
Je devrais travailler combien de temps
Monologue et dialogue entremêlés
Un télescope en alibi.
Faire un enfant à 55 ans ?
S’il fait des études longues et soutient une thèse, dans quel état serais-je ? Tu parles d’un cadeau.
Merci Françoise pour votre cadeau.
Merci pour votre lecture Martine Lyne
Khedidja
Merci Khedidja! J’aime beaucoup ce texte-fragment de vie. Je tombe dessus par hasard. Cet instantané, cette conversation presque anodine et qui raconte tant, c’est très inspirant.
Merci Michael pour cette lecture. On ne dit pas tout quand on parle, on en garde beaucoup pour soi.
j’aime les ellipses, les fragments qui dialoguent ou pas et ce qui se parle en dedans ( le glissement des hanches à l’idée du deuxième enfant – l’idée qui se prolonge et le calcul de l’age )