#40jours#8/ Strasbourg en morceaux

Ligne B, Faubourg National. Les enseignes clignotantes du Barber shop, la terrasse nonchalante du café Aux grains du bonheur, les vieux endimanchés, les tables bleues bien rangées le long de la pâtisserie syrienne Aroma sweet, les hommes par grappe qui sirotent un café, la vitrine et ses montagnes de baklawa. De l’autre côté de la rue, la terrasse du Tigre, bière locale et musique dont on entend les basses, étudiants de tous âges, bar rutilant et plantes vertes qui pendent du plafond. A quelques mètres plus loin, le Sahana, couture, retouches, petits travaux et relais colis, tenu par une famille indienne, souvent en skype avec mamie le samedi après midi. Dans la rue adjacente, la chaîne de magasins Boniface, toute l’alimentation venue d’Afrique, morue séchée, banane plantain, purée de piments, implants cheveux, cosmétiques peau noire, huile de palme rouge, pois de bambara. Ici on passe d’un pays à l’autre tous les trois mètres.

Ligne A, ancienne Synagogue-Les Halles. Foule les samedis après-midi qui se presse vers le centre commercial place des halles, toutes les enseignes que l’on retrouve partout, rien d’original, mis à part cette architecture sortie tout droit des années 60, bunker disgracieux qui abrite aussi une banque et un restaurant franchisé. Au pied du muret, là où patientent voyageurs, jeunes filles qui dégustent leurs glaces, sans domicile fixe et amoureux anxieux, une plaque commémorative, intégrée au sol, précisant qu’ici se tenait l’ancienne synagogue de Strasbourg, incendiée en 1940 par un commando des jeunesses hitlériennes.  

Ligne C, Esplanade. A gauche en sortant, le campus étudiant, avec la silhouette familière aux strasbourgeois du bâtiment de la faculté droit, puis du Patio. Un campus en pleine ville, à quelques pas du centre, à quelques mètres du quartier de la Krutenau, bars en tous sens et vie nocturne, école des arts appliqués, ancienne manufacture des tabacs, jardin botanique de l’université, pas loin le début de la Neustadt et les bains municipaux fraîchement rénovés. Le long de la ligne, quelques immeubles très hauts, ascenseur et confort années 60, centre commercial à proximité, collège Vauban, locaux de la Maison Théâtre, parc de la citadelle, puis en quelques coups de pédales, ou si l’on reprend le tram, on rejoint le jardin des deux rives, puis les premières rues de Kehl, d’où l’on peut apercevoir parfois la transhumance sur le pont de l’Europe des strasbourgeois motorisés venus s’approvisionner en fin de semaine en ration de tabac et couches pour enfants, meilleur marché de l’autre côté de la frontière.

A propos de Céline Bernard

Céline Bernard écrit principalement pour le théâtre, et assez souvent pour les adolescents. Elle a publié aux éditions Théâtrales jeunesse Anissa/ Fragments (février 2019), Demain et Les moineaux, paru au sein de l'ouvrage collectif Divers-Cités (octobre 2016), et une nouvelle, J'ai payé pour ça, au sein d'un recueil collectif aux éditions La Passe du Vent (2009).