#histoire #02 | histoire d’un accident

Histoire d’un accident, de sang, de répulsion, d’une gamine confondue avec un fou, un vagabond, une gamine volubile, surgie au milieu de la route, arrêtant la voiture, un frère, un père en contrebas, morts peut-être, une gamine qui n’a pas peur des inconnus, de parler, d’arrêter vélos, voiture, parce qu’en bas, la voiture d’où elle s’est extirpée, et son corps égratigné, et le sang sur sa peau, sur sa robe.
Histoire d’un article de journal à l’existence et aux propos douteux, rassurants, mais est-ce vrai? Et jamais ne le savoir. 

Codicille :  Comment la capter cette voix intérieure, silencieuse, non réfléchie? La saisir, vouloir l’écouter et la voilà qui se métamorphose, se singe, devient conscience, forcée, fausse. La plus proche pourtant, sa jumelle, c’est celle qui fait courir le stylo, les mains sur le clavier, qui les devance. Parole non réfléchie, parole qui va parce que ne se sait pas, ne s’interdit pas. Se suspend parfois. Devient regard, sourire, haussement d’épaule, devient souffle. 

Conducteur qui ne s’arrête pas : Ils pourraient se garer ailleurs, ils vont finir par provoquer un accident. Allez rangez-vous nom de nom. Sont vraiment dingues les gens, ne pensent vraiment pas aux autres. Comme si c’était un lieu pour discuter le bord de la nationale. Il avait peut-être crevé l’autre avec son Peugeot. Ça veut faire de la bicyclette et c’est pas foutu de mettre une rustine. Il est pas prêt à manquer de boulot le beau-frère avec tout ce qu’il en vend, Peugeot, des vélos et des autos. Elle était neuve la 504 blanche. Faudrait voir à combien il peut la toucher le beau-frère. Avec celle-là de bagnole, j’ai fait une affaire. Mais une 504, quand même… Je lui demanderai. 

 Fillette du couple qui s’est arrêté: Je veux pas que papa y aille. Je veux pas rester seule. Qu’est-ce qu’elle fait maman? Pourquoi il lui manque une chaussure à la fille? Et ses cheveux? C’est du sang? Je veux pas rester seule. Je veux qu’on parte. Pourquoi maman lui fait un câlin? Je veux pas rester seule. Pourquoi ces vélos? Y a personne. Et papa qui a sauté au dessus du parapet. 

Cycliste B qui s’est arrêté: J’aurai dû mettre un pantalon plus épais, bon j’avais pas prévu ça, sales ronces, c’est pas le moment de glisser, ça dévale, dangereux ce col, elle n’aime pas Hélène que je parte à vélo, elle a peur des voitures, dangereux à vélo qu’elle dit, ils étaient pas à vélo ceux-là, je me suis  pas précipité, j’ai laissé le collègue partir devant, j’y peux rien, ça me flanque la trouille de pas savoir ce qu’on va voir, suis sûr que quand je saurai,  ça ira mieux, mais c’est de pas savoir, deux elle a dit, le père et le fils, grand frère elle a dit, ça veut pas dire grand chose, quoi, dix ans elle a, douze, il accélère, il a dû voir la voiture. 

Cycliste A qui s’est arrêté : T’as bien fait de faire ce stage. PSL d’abord, ils ont dit. Et parler, pour garder la personne consciente. Le garrot, tu sauras faire? S’ils sont vivants on les déplace ou pas? Le gars a l’air posé, tu pourras compter sur lui. Le collègue est pétrifié. Il a même failli tourner de l’oeil. Si elle avait explosé, la voiture, on l’aurait entendue. Et si elle explosait maintenant? Tu te jettes par terre. Ne t’affole pas surtout. Elle aurait déjà explosé. La gamine était terrorisée. Elle a failli se faire écraser. S’est carrément jetée sur la route. Quelqu’un appelle! Ils sont vivants. Au moins un…

Femme du conducteur qui s’est arrêté : Sainte Vierge Marie, que le père et le frère soient vivants, je t’en prie. Et leur pauvre mère qui ne sait rien…

Conducteur qui s’est arrêté : la gamine est choquée mais pas blessée. Heureusement qu’elle a pu s’extraire de la voiture. Impossible de les voir depuis la route.  Ils pourraient rester là pendant des semaines avant que quelqu’un ne les repère. Un avion peut-être. Pas certain que la voiture soit visible depuis le ciel. Et encore faut-il qu’un avion de club passe par là et regarde. La mère aurait signalé leur disparition. Ça va si vite. D’un coup tout bascule. Je n’ai pas immédiatement compris. Heureusement que j’ai pilé. Attention à la racine. S’il sont tombés trop bas, on ne pourra pas y accéder. La gamine a pu le faire. Trois cent mètres, elle a dit. J’aurais dû lui demander par rapport à une longueur de stade. Tant pis. La caserne la plus proche est en bas du col, si aucune voiture ne s’est arrêtée, j’irai ensuite. On ne peut pas envoyer les cyclistes. C’est bien une voix que j’entends?

A propos de Betty Gomez

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5 commentaires à propos de “#histoire #02 | histoire d’un accident”

  1. C’est marrant, hier c’était le pain, aujourd’hui les véhicules. Deux déjà.

    Cette extension du corps qui change les voix? L’humain augmenté? Et si, à force d’essayer de l’augmenter depuis tous ces temps, « on » n’avait fait que le réduire, réduire les voix?

    Du pain, ça se mange.
    Un véhicule, ça ne se mange pas.

    L’assimilable et le non-assimilable?

    je vais aller ranger le garage en attendant…

  2. …pour y faire de la place pour une épicerie de secours, vu que quand je fais les courses, je prévois toujours pour deux ou trois guerres.