#rectoverso #09 | Gertrude Stein, Triades

JoséphineLa nuit, la chambre à coucher est son sanctuaire. L’obscurité dessine des silhouettes familières : l’armoire ancienne qui projette son ombre protectrice, la commode héritée de sa grand-mère dont les contours se fondent dans la pénombre. Au-dehors, les derniers bruits de la rue s’estompent peu à peu, laissant place à cette quiétude qu’elle affectionne. Ici, à ce moment de la nuit, Continuer la lecture #rectoverso #09 | Gertrude Stein, Triades

#rectoverso #08 | Michel et Joséphine parmi les fleurs

recto, Michel La radio souvent allumée dans l’arrière-boutique signale un bombardement ayant fait 75 morts, loin, très loin. Qui ? Pourquoi ? Pas dit. Nombre de blessés pas précisé. Suit un reportage de 10 minutes sur l’ancestrale fabrication de la guimauve par un maître-confiseur. Michel hausse les sourcils. Il se sent démuni, petit et faible dans son magasin de fleurs de la rue Pétel. Continuer la lecture #rectoverso #08 | Michel et Joséphine parmi les fleurs

#rectoverso #07 | Le fait est que l’intime est difficile à dire

rectoLe fait qu’ils ne lui ont rien donné contre la douleur, ils l’ont laissée seule dans une pièce sans la soulager, sans lui expliquer ce qu’il se passait. On lui lançait des regards insultants. Sur un ton indifférent, une infirmière lui a demandé trois prénoms au cas où se serait une fille et trois autres au cas où se serait Continuer la lecture #rectoverso #07 | Le fait est que l’intime est difficile à dire

#rectoverso #05 | Rien n’a vraiment changé

Je cours au-devant de ma mère. Mes sœurs sont un peu en arrière. Toujours complices toutes les deux. Moi la cadette, moi la spontanée, je les agace. Ma joie les agace. L’école a deux portes bleues, l’une au-dessus de laquelle on peut lire « filles » et l’autre où l’on peut lire « garçons ». L’école élémentaire Saint-Lambert, lieu de rires, lieu de jeu Continuer la lecture #rectoverso #05 | Rien n’a vraiment changé

#rectoverso #06 | Gaëlle Obiégly

Recto : Là tout prèsJe ne sais pas pourquoi j’y pense aujourd’hui. Peut-être parce qu’il sont plus nombreux que mes vivants. Ceux qui sont partis sont plus nombreux que toute l’humanité réunie de manière générale, depuis le temps. Partent-ils vraiment ? Nous abandonnent-ils ? Ils sont là. Tout près. Le jour, la nuit, peu importe. Je ne peux me résoudre à ces Continuer la lecture #rectoverso #06 | Gaëlle Obiégly

#rectoverso #04 | Marianne Alphant | Verso | Quel cadeau !

Les derniers rayons du soleil couchant filtrent à travers les rideaux de lin. L’odeur persistante du dîner flotte encore dans l’air, un mélange de rôti et d’épices du dîner. — Cette année, elle a fait fort ta mère. Elle veut toujours offrir le meilleur cadeau, dit-il en lui tendant les assiettes sales qu’elle place dans le lave-vaisselle. Debout entre la cuisine Continuer la lecture #rectoverso #04 | Marianne Alphant | Verso | Quel cadeau !

#rectoverso #04 | Marianne Alphant | recto | Pensées

Lorsque son aînée, encore toute petite, prononça un semblant de mot ressemblant à maman pour la première fois, elle se demanda si l’autre avait pu lui aussi dire ce mot ? Qui appelait-il en tendant ses petites mains dans le vide ? Quand l’avait-il dit ? Où l’avait-il dit ? À qui ? Quand sa fille fit ses premiers pas ? Elle pensa à Continuer la lecture #rectoverso #04 | Marianne Alphant | recto | Pensées

#rectoverso #03 | Camille Laurens

Recto Il y a des avis sur tout et sur rien, des spécialistes d’un jour, des spécialistes de circonstances, des spécialistes de la petite phrase et du mauvais jeu de mots. Il y a des moments que l’on aimerait oublier, des scènes que l’on souhaiterait n’avoir jamais vues, des mots que l’on voudrait n’avoir jamais entendus. Il y a des Continuer la lecture #rectoverso #03 | Camille Laurens

# recto 02 | Maylis de Kerangal

RECTO à ce stade de la nuit, les yeux ouverts sur l’obscurité, je cherche les images d’un passé longtemps enfoui, je ne vois rien car rien de ce que je cherche en cet instant n’a été vécu. J’entends une respiration lourde et régulière. Un camion passe dehors, il fait vibrer l’un des cadres posé sur la commode. Le drap pèse Continuer la lecture # recto 02 | Maylis de Kerangal