
LA VOISNE Ça arrive toujours quand je suis seule à la maison et que mes sœurs sont en vadrouille ce genre de chose. Pourquoi c’est toujours sur moi que ça tombe. La dernière fois c’était le robinet de la cuisine, plus d’eau pour faire la vaisselle, plus d’eau pour la lessive, et le robinet de la cuisine c’est le seul robinet en bas, l’autre est en haut pour le cabinet de toilette où on se lave les dents avant d’aller dormir et où on se débarbouille le matin. Et aujourd’hui, obligée de demander de l’aide aux voisins et le soir en plus avec cette tôle qui s’est envolée. Je n’aime pas demander de l’aide, encore moins aux voisins. Depuis que sa femme s’est noyée, son frère est toujours fourré chez lui, pour l’aider il dit, le soutenir. Vu le bruit de verre dans leurs poubelles, on dirait plutôt qu’ils soutiennent les bouteilles de whisky tous les deux. D’un côté, je comprends, perdre sa femme comme ça, se retrouver tout seul à son âge, mais quand même, quel exemple pour la petite, c’est la petite qui me fait le plus de peine, toute seule avec ces deux-là qui boivent tous les soirs. Toute la journée à courir dans les champs, avec les moutons ou au bord de la mer quand elle est à la maison, plus avec les bêtes qu’avec les humains. Ça doit être horrible de vivre dans cette maison-là avec ces deux-là, pauvre petite
ZEDOG Tous les soirs c’est pareil, ils m’oublient, dehors ou dedans, mais ils m’oublient. Le soir ils ne sont même plus capables de prononcer mon nom, d’ailleurs mon nom plus personne ne sait ce que c’est, tout le monde m’appelle Zedog, alors maintenant quand ils crient Zedog, je viens. La petite, elle, elle me donne plein de noms différents, mais elle est toujours gentille avec moi, jamais de coups de pied, jamais elle m’attache à la chaine, alors quel que soit le nom qu’elle me donne, je viens. Elle a pas souvent à m’appeler d’ailleurs, je suis toujours avec elle, j’ai juste à m’approcher de se main, à glisser ma tête sous ses doigts pour qu’elle me caresse et me gratouille derrière les oreilles, j’adore quand elle me gratouille derrière les oreilles. Mais ce soir, non, quand on est rentrés après avoir aidé la voisine avec le père et l’oncle, elle dormait tellement dans le fauteuil du père que j’ai eu beau me glisser sous sa main, la lécher, soupirer avec insistance, rien pour la réveiller et puis elle sentait bizarre, comme son père et son oncle quand ils boivent le soir après l’avoir envoyée se coucher
LE PÈRE Y’en a marre d’habiter ici dans ce coin pourri, la mer, le vent, et la voisine, enfin pas qu’elle, les trois sœurs, pas une pour racheter l’autre, elles peuvent pas se trouver un homme, au moins un pour faire le boulot ? Les robinets, le toit, c’est toujours pour moi, et même pas un tournevis dans cette baraque. Ça des petits napperons, y’en a, mais même pas un tournevis. Suis dehors toute la journée moi, faut tout faire ici, je suis tout seul maintenant, elle me manque et en plus faut que je fasse tout le boulot, et la môme par-dessus le marché. Heureusement, demain, elle repart en pension. Je sais pas m’occuper des enfants, moi, c’est pas le boulot d’un homme de s’occuper des enfants, je sais pas faire moi. Et puis la voisine elle en profite, elle dit qu’elle vient s’occuper de la petite et elle est toujours fourrée ici à nous regarder de travers quand on boit un petit coup avec mon frangin le soir. On a quand même bien le droit de boire un petit coup le soir après une journée dehors avec ces satanées bestioles de moutons. Déjà qu’y a pas de pub dans ce trou perdu. Pourquoi elle est partie, hein, pourquoi elle est partie. Maintenant je suis tout seul dans ce trou perdu avec seulement la mer et le vent
L’ONCLE Elle m’énerve la voisine, elle m’énerve. Toujours aider, faut qu’on l’aide, fait qu’elle nous aide, qu’elle aide mon frère. Moi elle a pas intérêt à venir m’aider, je m’aide bien tout seul, elle a pas intérêt à venir, la voisine, je suis pas son prochain, moi, qu’elle me lâche la voisine. Elle peut bien aider la gamine si elle veut, ça, je sais que mon frère il est bien embêté quand il faut s’occuper de la gamine, mais qu’elle vienne pas m’aider moi, elle y connait rien à rien des moutons en plus, sauf quand ils sont en boules de laine pour tricoter ses napperons, si au moins elle pouvait tricoter des pulls et des bonnets, au moins ça, ça tient chaud. Qu’elle vienne pas m’aider ni mettre son nez dans mes affaires, la voisine. On lui remet ses tôles sur son toit et en plus elle nous regarde bizarre parce qu’on a juste un peu bu. Qu’elle vienne pas m’aider, la voisine
Codicille :
Pas eu de mal à choisir l’histoire pour laquelle il fallait des témoins (merci les commentaires), plus de mal à trouver des témoins étant donné que Mow fait ça en cachette. Revenir ensuite sur cette histoire de whisky, c’est inévitable pour une histoire qui se passe en partie en Écosse. Déjà un texte sur le Tiers Livre je crois, sur Islay au port Charlotte Hotel qui fait aussi pub, pas seulement Hotel.
Il faut vraiment que je rassemble tous les textes autour de cette histoire, pour en faire une histoire
« Il faut vraiment que je rassemble tous les textes autour de cette histoire, pour en faire une histoire »
tûtàfè!!!!
Hoy!!!
Hoy!!!
Hoy!!!
(comme un cri d’encouragement….faudrait pitêtre que j’aille y voir son étymologie à lui? Ou juste le laisser sortir comme ça, comme une seule lettre? Ouè, pour le moment juste comme ça, comme une seule lettre…).
Hoy c’est aussi le nom d’une île des Orcades, et c’est bien toi qui me parlait des Orcades ?
Hoy!!!
Hoy!!!
Hoy!!!
(c’qui y’a d’bien, c’est qu’ça sert à tout!!! Yes!!! Yes!!! Yes!!!)
J’adore. Ca me fait penser aux romans choraux de Violaine Bérot, surtout « Tombée des nues »
Grand merci Natacha, j’adore les j’adore !
Au départ je ne voulais garder de ces témoignages que les idées, pas la forme, mais peut-être que finalement, il faudrait que je les regarde mieux, peut-être qu’ils pourraient se faire une place dans ce qui sera après.
Et merci pour Violaine Bérot, je ne connaissais pas, vais aller y jeter un coup d’œil