Il y a la lenteur pour mais le pas presse Il y a la douleur de et celle de ne pas Il y a toi avec l’autre et toi seule et cette façon de t’appuyer contre et de lever les yeux pour ou de rire Il y a à l’intersection l’arbre comme un phare avec des bras tordus Il y a la neige la première fois et toutes les autres mais c’est toujours la première fois Il y a l’inflexion de ta voix quand tu dis non et que j’entends oui ou le contraire Il y a cette façon que tu as de ne dire ni oui ni non quand elle est déjà au bout de la rue poing levé écharpe rouge et qu’elle danse Il y a au recto et au verso le même silence de chaque côté la même rage blanche et quelque chose en transparence Il y a ce que tu ou ce que tu ne Il y a quelqu’un sur le trottoir et tu passes : tu as fait ça : Oui : Je n’y crois pas Il y a cette façon de s’arranger avec l’oubli ou d’oublier pour Il y a qu’on dirait qu’on serait Il y a les châteaux quand la mer monte Il y a les concours d’apnée dans la baignoire et les livres sur l’étagère surtout ceux qu’on ne peut pas attraper Il y a des crayons de couleur dans une boîte et Babar qui tient des ballons sur une affiche à dix euros Il y a un jeu de cochon pendu et un cochon dans la rame Tu l’as vu? Je crois, oui Il y a une bille qui tombe de sa bouche : Attention elle pourrait : Quoi ? l’avaler: Ah tu crois Il y a le regard oblique de la jeune fille au turban qui regarde ailleurs en te fixant et sa perle pend Il y a un coquelicot et des tournesols sur la boite de bonbons Il y a dans cette île pas très loin une mouette sur le dos avec l’ aile repliée comme quelqu’un qui dort et elle pourrit Il y a quand on se penche pour boire des fleurs tombées dans le ruisseau Il y a un premier soir puis un deuxième jour et pas assez de doigts pour compter et parfois la main tombe avant qu’on ait fini Il y a un feu qui couve dans l’œuf mais tu as fais un nœud à ton mouchoir Il y a l’information en temps réel et tu ne peux pas la recouvrir à cause du nœud à ton mouchoir Il y a des gens avec des téléphones et des oreilles augmentées en plusieurs couleurs dans plusieurs langues assis debout qui se frôlent sans masque depuis hier Tu as vu: Oui Il y a oui pour ne pas dire non quand tu penses non Il y a un oui pour un non et un oui qui reste sans voix Il y a oui qui ouvre un chant d’infini et NON qui ferme dans les deux sens mais ce qui est vrai dans ta langue ne l’est pas forcément dans l’autre Il y a du pigment dans un bocal comme la mer dans un coquillage Il y a cette façon de ne pas fléchir qui n’appartient qu’à toi Il y a le jour de sa naissance avec ce duvet sur ses épaules et c’est comme une petite bête qui se déplie Il y a le nom et le prénom qu’elle reçoit chacun avec les trois lettres du oui Il y a qu’il fera beau et chaud comme la veille de ce jour-là Il y a que les jours ont rallongé pour raccourcir : déjà ? Oui ll y a une tombe sans nom dans l’allée Il y a qu’il a dit: Ich sterbe : Ah tu crois : Da
Oui trois voyelles comme une interjection et quelque chose en suspension Oui : une ouverture? un devenir ? Un écho?
Oui peut se fermer comme un non
Quand tu perds à ni oui ni non tu dis plus souvent oui que non : tu crois : oui : Tu es sure : Non
Oui et toutes les inflexions du oui
Oui à l’aube d’été Oui à cette poussière d’or qui retombe au couchant
Oui comme un commencement sans fin
Un oui pour non c’est courant non? On t’a appris à dire Oui plutôt que non : Oui et Non mais Oui
Oui c’est la politesse des filles
Savoir dire non pour dire vraiment Oui
Oui de Oui
Oui de Oui pour et Oui contre
On y va
Oui mais y a encore du boulot
ça me fait comme une géométrie dans la tête ces passages d’une chose à l’autre
« Il y a qu’on dirait qu’on serait »
Merci Nathalie pour ces pluriels. Touché.
Très beau ce bloc, minutieux, merci.
« oui peut se fermer comme un non », d’où l’indécision des mots selon comment on les torture, les assemble, les contourne
j’ai retenu fort « il y a la neige pour la première fois »
et « il y a la première nuit »
après tout, c’est peut être un peu la même chose non ? oui ?
(contente de te retrouver, Nat)
Il y a une tornade qui s’envole avec force, fait mine de se poser, repart, enchaîne les figures, vole. Oui ou non, tu me suis ? Je te suis et j’aime ça. Merci
le quotidien et l’insaisissable qui affleurent, l’humour et la douleur, quelque chose résiste, ça tremble et ça nous touche.
Merci Caroline, Louise, Françoise , Clarence, Ugo , Catherine pour vos passages
J’entends la chanson, la chanson qui nous gagne, le derviche de la tristesse qui tourne et retourne et finit par se déprendre de la tête,
cette cadence inénarrable et fougueuse de Brel
folie géniale qui fend le coeur : « Il y a un premier soir puis un deuxième jour et pas assez de doigts pour compter et parfois la main tombe avant qu’on ait fini »
cette générosité de Brel
et puis
soudain ce oui félin, agile enfant
hardiesse si fine d’un dialogue à la Sarraute
merci fort Nathalie
je suis un peu comme Françoise Breton, je trouve le mouvement derviche peut-être à cause des virgules qui tournent elles aussi (trop bien) (j’avais vu l’image mais c’était les pattes jaunes en palmes qui m’avaient peut-être bien blessé) (en tout cas merci oui)
Françoise, Piero , Merci d’être venus par ici . Merci de vos retours.