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2019.09.19 | recyclage nuit de la vie inutile

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2021.09.06 | la France qui morte
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Quelquefois ça t’énervait : un tel chemin d’invention, tant de ressources précieuses, de logistique (fibre, routeurs, câbles, antennes) pour en arriver à ces fadaises qu’ils et elles se disaient dans leurs prothèses téléphoniques. Vivre sans chargeur n’était plus possible. L’idée avait alors germé de les utiliser plus intelligemment, ces chargeurs. Ils n’étaient pas difficiles à détecter. On collectait alors tout ce à quoi ils avaient accès des téléphones qu’ils alimentaient. On considérait que l’utile et le personnel appartenaient aux utilisateurs. On n’y touchait pas (on avait vu ce que ça donnait pour Facebook et autres, on avait retenu la leçon). Mais les paroles inutiles.... Les fadaises, les consultations abêtissantes. Une fois tout collecté, on l’envoyait par camion ici, chaque nuit. Aussi bien, elle aurait fermé, peut-être, sinon, la vieille usine. On remélangeait tout, et on réexpédiait par d’autres camions. Le gain d’énergie retraitée et recyclée n’était pas énorme, mais suffisamment conséquent : qu’ils et elles parlent donc pour ne rien dire s’ils voulaient, ça alimenterait la suite des conversations. On commençait à multiplier ces points de collecte et recyclage, ils compléteraient les déchetteries : qui aurait pensé, il y a trente ans, au rôle et à l’importance de nos déchetteries ? et ça leur redonnait vie, à nos usines du temps passé. À peine quelques hommes suffisaient la nuit aux machines (la nuit les refroidissait mieux). Parfois, si vous les connaissiez, ils ouvraient un tout petit sas et vous les entendiez, toutes ces paroles et fadaises inutiles qu’ils retraitaient. Ça ne donnait pas une idée très belle de nous-mêmes, l’humanité.

 

 


François Bon © Tiers Livre Éditeur, mentions légales
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1ère mise en ligne et dernière modification le 19 septembre 2019
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